La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795

Lo 1

qu'il eft plus aifé d’y découvrir tout le jeu & tout lenchaînement des fcènes, il n’en fixera que mieux fans doute le regard des hommes qui, comme vous, Monfieur, conremplent l'étrange révolution dont toute la Chrétienté eft menacée, qui cherchent à en étudier les caufes pour en pénétrer les réfultats, & qui prévoient avec effroi que l’un des plus inévitables fera de faire pañer les peuples à la tyrannie durable d’un defpote à travers la tyrannie paflagère de la populace, Parmi les orandes & falutaires vérités qu’on peut tirer de cet expolé de la petite révolution de Genève, Je me bornerai, Monfieur, à préfenter les fuivantes à la méditation de vos compatriotes.

Qu’une première révolution, terminée à propos, peut quelquefois établir la liberté; mais qu’alors, toutes révolutions fucceflives la détruifent d’autant plus irrévocablement, qu’elles en infpirent au peuple, d’abord l'indifférence, puis la iaffitude, bientôt après le dégoût, & enfin la haine.

Que, quelque accoutumé que puifle être un peuple aux commotions politiques, ce qu’on appelle aujourd'hui du nom de Révolution eft le plus grand des fléaux qui puifle le frapper.

Que les premiers auteurs de toute Révolution pareille en feront infailliblement par-tout les fecondes victimes.

Que le caraétère moral & bon d’aucun peuple connu ne peut le raffurer d'avance fur ce que l’invañon d’une pareille doétrine ferait chez lui moins deftructive qu'ailleurs ; parce que ce caraétère fera dénaturé dès le lendemain même du jour où elle l'aura atteint.