La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795

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que les idées les plus douces d’une liberté fage, qui avait élevé leur petite patrie au plus haut degré de profpérité poffible, quoique fes divifons intéftines en euffent arrêté quelquefois le cours. Le retour périodique de ces divifons (1) a fait croire à quel-

nève, qu’à fubir {on fort, quelque défaftreux qu’il foit. ‘Tôt ou tard le moment viendra pour elle d’en rappeler à l’Europe en lui expofant combien elle s’eft débattue avant de s’y foumettre, & combien il Jui devint impoñible d’y réfifter, lorfqu’après la conquête de la Savoie, elle fe trouva entièrement enclavée dans le territoire Français. Mais fi, avant cette époque, les anciens membres du véritable Corps Lésiflatif de Genève concourent à un feul aéte par lequel on puiffe leur imputer d’avoir librement & volontairement renoncé à une Conflitution que, jufques-là, il n'avait pas été en leur puiflance de défendre ; ils produiront de nouvelles incertitudes dans l’efprit de leurs compatriotes; îls fai bliront le parti qui réclame les anciennes loix:; & ils perdront une grande partie de l’intérêt précieux qu’ils ont infpiré aux Etats qui les envifagent à jufte titre comme les victimes de leur attachement aux formes antiques de la République. Le grand jour de juftice qui s'approche ne ferait plus pour Genève un jour de délivrance ; elle fe trouverait fans point de réunion au dedans, & fans proteéteurs au dehors,

(1) Sans entrer ici dans les détaïls d’une imperfe&tion particulière aux loix de Genève, & qui avait laifié fubfifler le principe d’un conflit durable entre les divers Confeils de l’Etat, fans prétendre non plus juflifier ici ni la naiflance ni le trop fréquent retour de ces conflits, dont on s’était flatté d’avoir enfin détruit le principe en 17013 il m'eft permis de dire du moins que, jufqu’alors, les di. vifons des Genevois elles-mêmes avaient toujours porté le fceau de leur attachement à leurs loix fondamentales, puilque, loin d’avoir pour objet le renverfement de ces loix; elles ne roulèrent au contraire que fur le fens qu’on devait donner à la lettre de ces mémes loix, pour les conferver intaétés : mais ce que je me fers

(Le