La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795

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menaçèrent même les Juges hypocrites quiofaient tenir ainfi, en fecret avec leur Confcience, un langage fi diffé rent de celui qu'ils avaient profeffé vis-à-vis de leurs Commettans. À cette menace, les Juges intimidés recommencèrent immédiatement leur pocédure, en donnant cette fois leurs opinions à haute voix, & au bruit des vociférations des galeries, où l’on n’entendait que des cris de mort. Alors fept des huit premiers accufés furent condamnés à perdre la vie, par les mêmes hommes qui en avaient abfous fix la veille, & qui n’en procédèrent pas moins à cette’ feconde fentence, en prenant l’Etre fuprême à témoin de leur juftice, & en fe permettant de temps à autre les plus lâches bouffonnéries. Dès le lendemain, la nation révolutionnaire, qui s'était réfervée le droit d'appel, fut convoquée en armes pour fanétionner ces jugemens : mais quoique, fous prétexte de l'épurer, on en eût exclu l’élite des citoyens, la grande pluralité des fuffrages fut pour la vie des trois principales viétimes dévouées. (1)

À lafpet de ce nouveau déchiffrement, & de ce premier acte national de repentir & de remords, les confpirateurs fubalternes annoncèrent la plus forte indignation, rejetèrent ce nouveau réfultat comme l'effet d’une combinaifon ariftocratique, & fe livrèrent aux imprécations les plus horribles. [ls pourfuivirent même dans les rangs deux ou trois citoyens qui en étaient fortis pour inviter les affiftans à faire refpeéter le vœu que venait de prononcer le peuple, & à ne

point

(1) Ceyle, Prévof, & De Rochemont,