La Serbie

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I Samedi 16 Février 1918 — No 7

appels équitables du peuple yougoslave et du droit incontestable qu'il a de faire son unité par la création d'un Etat indé-

pendant. La formation de cet Etat est une -

nécessité qui s'impose et toutes les lois sociales de la démocralie moderne en font foi. À

On songe à laisser la majeure partie

du peuple yougoslave souffrir et étouf-.

fer sous le joug, sous le régime de la fausse liberté, des autonomies ficlives sous l'autorité fracassière de la vieille monarchie corrompue des Habsbourg. Cet état desprit nouveau trahit des méthodes opportumistes et révèle de la faiblesse et de Pinjustice.

La jeunesse universitaire yougoslave en Suisse, se considérant comme les représentants intellectuels du peuple yougoslave, proteste de da façon la plus énergique contre toute entalive tendant à menacer les aspiralions légitimes des Yougoslaves ; elle déclare:

1. — Que les Yougoslaves (SerbesCroates-Slovènes) ne se contenteront jamais d'une solution partielle et incomplète de leur question nalionale.

2. — Qu'ils exigent que cette question soit résolue dans toute son intégrité Conformément au droit des peuples de disposer d'eux-mêmes, droit que nos Alliés ont proclamé bien haut.

3. — Elle prie les représentants officiels

du Gouvernement de Serbie et le Comité Yougoslave de Londres, de vouloir bien préciser la situation politique dans laquelle se trouve notre peuple et d'entreprendre une action énergique pour que notre question nationale reçoive une solution équi-

table et conforme à la volonté de notre peuple. 4 — Elle attend que l'esprit révolution-

naine de Russie provoque aussi ses effets en Autriche-Hongrie et rende la liberté aux peuples opprimés, Yougoslaves, Tchéco-Slovaques, Polonais, Ukrainiens, Italiens et Roumains. Nous saluons tout mouvement révolutionnaire en AutricheHongrie tendant À la délivrance politique et sociale des peuples soumis aux AustroMagyars. A tous ceux que les faifs dont nous venons de parler, à Ceux (que nos demandes légitimes laisseraient impassibles, nous rappelons que le droit à la vie et au libre développement des peuples ne peut être aboli par personne. Lorsque le pouvoir politique officiel est impuissant, l'énergie des peuples commence à se faire sentir. Lorsque le premier cesse d'agir avec efficacité, le second prend sa place Notre peuple qui, sur les champs de bataille des Balkans et de a Dobroudjæ a renversé des barrières qui paraïssaient insurmontables, Saura faire valoir ses droits à la vie et à la liberé.

Les socialistes serbes et le discours Lloyd George

La conférence des Trade-Unions tenue à Londres le 28 décembre, avait adopté Ja résolution préparée par le Comilé exéculif du Labour Party et par le Comité parlémentaire des Trade-Unions. Cette déclaration, qui à élé présentée au Congrès du Labour Party à Nottingham, les 23-25 janvier, exigeail pour les peuples balkaniques : « Liberté complète de ces peuples de déterminer leurs propres destinées, en dehors de la domination turque ou autrichienne ou de toute autre domination étrangère, et l'entrée de tous les Etats nationaux balkaniques dans une Fédération pour le règlement par consentement mutuel de toutes les questions d'intérêt commun ».

Après le discours de Lloyd George, le comité du parli socialiste serbe en France, et le camarade Markitch, délégué du parti socialiste de Bosnie-Herzégovine, ont adressé À la conférence du Labour Party une protestation, dont nous reproduisons les passages suivants:

« Votre déclaration, claire el précise, a rempli de joie tous les socialistes yougoslaves, comme socialistes et comme membres du peuple serbo-croato-slovène 0pprimé. Mais, aussitôt après voire déclaration, il nous est parvenu une voix d'Angleterre qui a jeté tout notre peuple dans le désespoir. C’est le grand discours de M. Lloyd George, prononcé devant les délégués des Trade-Unions. Dans son discours, d’une importance historique, M. Lloyd George ne partage pas la conception du droil des peuples du Labour Party et étend différemment aux diverses nalions lapplication de ce principe. La conception de ce principe de M. Lloyd (George est également la nôtre, quand. il s’agit de son application à l’Alsace-Lorraine, à Ia Pologne, aux régions autrichiennes habitées par les Italiens, à l'Arabie, à l'Arménie, à la Mésopotamie, À la Syrie el à la Palestine, mais elle est différente quand il s’agit des Yougo-

-islaves, des Tchéco-Slovaques, des Ukrainiens et, paraît-il, des Roumains aussi. Pour les premières nations il demande le droit de se séparer de leurs maîtres et de fonder ou des communautés indépendantes ou de s’agréger aux collectivités vers lesquelles elles inclinent de leur volonté librement exprimée. Dans le second cas, il ne reconnaît pas le même droit aux Yougoslaves, aux Tchéco-Slovaques et aux Ukraimiens. Le droit des peuples-pour ces nations ne doit signifier, selon lui, que le droit

À l'autonomie dans les cadres de l'Etat oppresseur. Neuf millions de Tchéco-Slovaques, sept millions et demi de Yougoslaves, plus de trois millions d'Ukrainiens doivent rester, aussi bien dans l'avenir comme dans le passé, sous la domination des Habsbourg, dans l'esclavage austromagyar, quoique ces nations aient subi pou présent des sacrifices inouis pour eur délivrance du joug étranger et quoiqu’elles aient manifesté maintes fois, avant et au cours de cette guerre, par leurs actes et leurs paroles, des cléricaux jusqu'aux socialistes, des bourgeois jusqu'aux ouvriers, le désir irrésistible de se libérer de leurs bourreaux austro-magyars el de créer des Etats indépendants.

On ne reconnaît pas à ces nations le même droit qu'aux autres, malgré leur volonté de se séparer de l'Etat étranger et de fonder leur communauté en pleine liberté et indépendance, volonté au moins aussi claire que celle des autres; malgré que leur capacité pour Îa vie nationale séparée soit au moins aussi grande que

celle des autres. Non seulement on ne leur reconnaît pas le même droit, mais de plus on ne demande pas même qu’elles soient consultées sur leurs statuts futurs. On les force. contre leur volonté clairement exprimée, de rester sous .une souverainelé qui leur répugne.

Au nom du principe du droit des peuples et du libre développement de notre nation, dans l'intérêt de la paix mondiale, du progrès de l'humanité et de la marche victorieuse du socialisme, nous. en qualité de socialistes et de membres de Ja nation yougoslave opprimée, protestons contre cette duplicité dans la çonceplion du droit des peuples et contre ceux qui le dénaturent quand il s’agit de son application À notre peuple.

Pour ces raisons, nous nous adressons à l'Angleterre ouvrière el socialis'e avec la conviction qu'elle va proclamer à haute voix encore une fois: qu'il n’y a qu'un droit des peuples et qu'il doit être appliqué également à toutes les nations opprimées

et que la justice, toute la justice, s'exerce

pour toutes les nations. L’éthique prolétarienne ne connaît pas deux droits. deux justices. »

La vente des forêts monténégrines

L’ « Az Est », de Budapest, du 16 janwier, publie l'information suivante que mous reproduisons uniquement à titre d’information :

« Le comte Armin Mikes, le grand industriel hongroïs, a acheté, il y à quelque temps des forêts immenses. Cet achat est intéressant au point de vue international. Après de longues négociations, le comte Mikes a acquis de grandes forêts au Monténégro, dans la région (de la Tara, dont on pourra exploiter environ 4 à 5 mitlions de mètres cubes de bois tendre. La cour monténégrine est intéressée dans une partie de ces forêts. Les négociations ont été excessivement dlaborieuses: elles ont été poursuivies en partie dans un pays neutre. Tout un essaim d'agents a travaillé à la conclusion de Vachat, qui n’a réussi définitivement que

grâce aux efforts de personnages très haui

placés. »

R propos d’une interview du roi Ferdinand

On se rappelle qu'à la veille de Noël, le roi de Bulgarie s'était laissé interviewer par un de ses amis, le professeur Adolphe Strauss. L'interview publiée par la «Neue Freie Presse » du 24 décembre, a 6lé reproduile, dans ses lignes principales, par « La Serbie »

L'Agence Télégraphique Bulgare de Sofia transmettait quelques jours plus fard à la presse neutre (« Neue Zürcher Zeitung » du 2 janvier 1918) un démenti de Radoslavoff disant que «les déclarations attribuées au roi de Bulgarie n'étaient pas exactes et que le cours des idées du roi n'avait pas été fidèlement représenté ». Ce démenti avait été donné, daprès VA. T. B., comme réponse à une question faite au cours des débats budgétaires par un député de lopposilion.

A. Strauss envoya de même pour son compte personnel, cinq jours après

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la publication de l'interview, une mise au point (« Neue Freie Presse » du 29 décembre 1917), concernant le passage où il est dit que «la Bulgarie se tient aujourd'hui encore sur la base du traité de 1912 ». Il ajoutait que ce passage devait être ainsi lu: « La Bulgarie ne Se tient plus aujourd'hui sur la base de ce traité ».

Nous enregistrons ce jeu bulgare sans lui donner trop d'importance. On sait ce qui attend celui qui nous attaque dans le dos pour nous dépouiller de notre avoir. La Bulgarie, pas plus que les autres coupables, n’échappera au Code Pénal [nternational. Nous Sommes pourvus de patience. La Bulgarie et ses buts de guerre

M. Radoslavof a fait à Sofia, au Sobranié bulgare, un long exposé des buts rle guerre Hejfla Bulgarie et de sa participalion aux négovialions de paix ave la Russie. Il a relevé que tous les peuples veulent la paix; les Bulgares aussi, mais ils veulent une paix honorable consacrant leur unité nationale. ï .. «Cette unité, at-il dit, constitue leur seul bui de guerre. Si les Bulgares ont consenti aux sacrifices douloureux supportés pendant la guerre c'est pour réunir tous les tronçons épars en un seul Etat unifiant le peuple bulgare dans ses limites ethnographiques. Cette unification comperte la réunion de la Dobroudja, du phys ile la Morava et de la Macédoine à la Bulgarie, leur mère-palrie. Elle m'est pas en contradiction avec les formules de paix sans annexions forcées sur la base de la libre détermination (lu 6ort dies peuples par eux-mêmes, car la population de ces ecotrées a manifesté déjà à plusieurs reprises sa nationalité bulgare et sa volonté de garder cette nationalité. !

L'histoire bulgare n'est, en somme, qu'une série de manifestations Ke ce genre. C'est la réalisation de ce vœu mational que la délégation bulgare avait à défengre à Brest-Litovsk. Elle l'a fait qusqu'ici avec succès. »

M. Radoslavof a relu la dépêche déjà connue il y à quelque temps annonçant que les délégués avaient eux-mêmes proposé de déclarer la cessation de la situation «ante bellum» telle qu'elle avait été créée par le traité de Bucarest.

Cette dépêche, a dit M. Radoslavof, a été mal interprétée par quelques-uns comme une condition, de la, paix. En réalité, la proposilion russe a été acceptée en principe dt sera consacrée dans le traité de paix qui terminera Jes négociations actuelles entre la Quadruplicé et la Russie.

M. Radoslavof a retracé l'histoire des négociations, soulignant les difficultés résultant de lhétérogénéité des délégations adverses qui représentent nen un seul pays, mais um groupe de républiques indépenidantes. Il a exprimé le ferme espoir que les négociations aboutiront finalement à une paix séparée avec la Russie qui aura pour cffet de rapprocher la Bulgarie de la paix générale.

M. Radoslavof a déclaré que les revendications des Bulgares ccncernant leur unité nationale ne rencontrent point d'’obstaclke à BrestLilovsk et forment un point essentiel du programme de leurs alliés, l’Alllemagng et l'AutricheHsangrie. La paix sans annexions forcées ne porte, dans aucun cas, préjudice à la Bulgarie, ni à l'unité bulgare Les territoires nécessaires à la réalisation de cette unité sont garantis par les alliés.

Le président du coonscil a ajouté :

«La Bulgarie fouit d'une excellente situation dans l'alliance. Elle sait le rôle qui lui incombe. Flle sait aussi que dans cette alliance, il y a des intérêts autres que les siens, que, par conséquent, la fin de la guerre ne flépend pas seulement de sa, volonté. » \ i

Après M. Radoslavof, les cheïs des groupes d'opposition, qui avaient eu, avant la séance, un entretien prolongé avec le ministre président, ont exprimé l'adhésion pans réserves de leurs frac-

. tions au programme d'unification nalionale exposé

par Île gouvernement; cependant, ils ont exprimé un certain mécontentement au sujet de l'attinnde adoptée à l'égard de la Bulgarie par certains hommes d'Etat des puissances alliées. Les paroles du comte Hertling idisant qu'il laissait au comte Czernin le soin de parler sur les affaires des Balkans ont été inierprétées par ces vorateurs comme un désistement de l'Allemagne \ans la question -des revendications bulgares.

Le socialiste Pastouhof a exposé que son parti demandant par principe la libération de tous les peuples ne peut être opposé à la libération intégrale de la nation, bulgare et à son unification en un seul Ftat.

Le chef des démocrates, M. Malinof, a demandé une défense plus énergique des revendicationg naticnales dont la réalisation sera indispensable à l'avenir de la Bulgarie. Les clefs de la politique bulgare, qui étaient jadis à Petrograd et à Vienne, doivent maintenant être à Sofia. Tout en Sculignant que personne, en Bulgarie, ne songe à modilier la politique extérieure actuelle, il a demandé que la Bulgarie ait sa pleine indépendance politique et économique.

M. Thcodorof, chef du parti populaire, a soutenu le même point de vue. Il a relevé la mécessité pour la Bulgarie de renseigner ses alliés sur la nature et la portée de ses revendications. Rappelant la proposition de M. Wilson pour la sclution des questions balkaniques, par la voie d'accoriis réciproques, il a dit: «C'est une chose irréalisable tant que les Serbes persisteront dans leurs dispositions actuelles, tendant À contrecarrer l'unification bulgare, » ÿ

Le chef des socialistes marxistes, M, Blagoef,

a développé l'idée d'une confédération balkanique dans daquelle il voit le seul moyen d’unifier les peuples des Balkans et d'assurer leur avenir.

Une note officieuse de Sofia allirme que 4 débat a montré la bonne volonté évidente des différents partis d'aider le gouvernement à parn. chever l'œuvre nationale commencée. i

«Le gouvepnement en sort renforcé, dit-elle, | ce que tous les milieux officiels reconnaissent ave une satisfaction nion, dissimulée. » |

Nous reviendrons sur ces déclarations ans notre prochain numéro. |

La politique en Autriche-Hongrie

Yacha Tomitch en liberté

Le « Budapesti Hirlap » du 8 janvier, publie linformalion suivante:

& L’« Uijvideki Hirlap» écrit que 1e sexa-" génaire Jasa Tomic, ancien rédacteur en chef du journal serbe «Zastava» de NoviSad. est rentré samedi dernier avec sa. femme das cette ville après une absence” qui durait depuis le commencement de la guerre. Tomic a déclaré à un journaliste | que sur ces trois ans et demi, il avait passé ; douze mois en prison ef qu'il avait été

interné le reste du temps ainsi que pa femime .Tomié a déclaré ne

pourquoi il avait élé mis en prison, pourœquoi il avait été interné ‘et pourquoi enfin on venait de lui rendre la liberté. S'il avait été coupable, dit-il, il aurait été déjà pendu. Le journaliste serbe se trouve au point de vue malériel complètement ruiné. Tomié a l'intention dé collaborer À une revue féminine que sa femme wédigeait avant Ja guerre el qu’elle se propose de publier de DOUVEAU. »

Ex insérant cette nouvelile, nous tenons à ajouter que M. Jasa Tomic est le chef du parti radical serbe en Hongrie. C'est un personnage politique de premier ordre, ef, comme directeur de la « Zastava», de 4 même que comme auteur d’un très grand nombre d'ouvrages politiques et de socio- |

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pas Savoir M .

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logie, il a pris unè part active au mouvement des Serbes soumis à la domination magyare.

Les théories rétrogrades des Magyars

Le « Budapeti Hirlap > du 13 janvier publie l'information suivante: E

« Le baron Wlassics, président du tri . bunal administratif en Hongrie, s’est exprimé ainsi dans son allocution du nouvel an:

« Un trailé de paix qui placeraït le droit des peuples de disposer d'eux-mêmes audessus de ‘la souveraineté de l'Etat magyar millémaire, ne $erait que la caricature d'une paix durable. | Bien, plus. un tel traité serait en contradic- . tion avec le principe de l’évolution progressive des Elats, grâce aux lois de laquelle les tribüs sont devenues la plèbe, la plèbe, le peuple capable de constituer l'Etat et | le peuple. l'Etat. » |

La jeunesse universitaire serbe

en Suisse |

Les Serbes, Croates el Slovèmes — constituant par la race, par la langue et par Ja civilisation un seul peuple yougoslave — ont. dans leurs combats sur différents | fronts contre la Monarchie austro-hongroise . où dans les discours prononcés par leurs représentants nationaux et leurs intellecbuels, affirmé à d'innombrables reprises leurs revendications légitimes en faveur de leur vie culturelle et politique indépendanite. de même que le vœu de s'unir avec la Serbie et le Monténégro en un Fat démocratique et souverain.

La jeunesse universitaire serbo-croatoslovène en Suisse considère comme son. devoir sacré de contribuer, elle aussi, dans la mesure de ses modestes forces. À la réalisation (die l'idéal national. Afin de rendre som activité plus énergique et plus utile, la jeunesse universitaire s'est une en une organisation générale.

L’ «Organisation Générale de la Jeunesse Universitaire Serbo-Croaito-S'ovène unie en Suisse» se propose comme but de demañ-

der — en organisant des conférences publiques et en publiant des brochures. des

appels et des memorandums — l'union intégrale de toutes les fractions de 501 peuple en un Etat indépendant et dé mocratique, organisé sur la base des pri” cipes de la souveraineté nationale. eXPIT mée par son assemblée constituante, COM . posée de représentants nationaux élus AU suffrage universel, secret, égal et direct . Le Comité Central, composé de délégués de toutes les les sociétés d'étudiants Serbo-croalo-slovènes en Suisse, est Por gane exécutif et le représentant de 1 «OTganisation Générale de la Jeunesse Unr versitaire Serbo-Croato-Slovène unie €. Suisse ».

Le Siège du Comité Central est à Lau sanne.

Le Comité Central.