La Serbie
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LA SERBIE
No 20
Samedi 18 Mai 1918
triche-Hongrie se réserve de construire un canal par le territoire bulgare; la Bulgarie cède à l'Allemagne les deux riches mines de Bor et Pernik (à noter que cette dernière mine se trouve en Bulgarie propre, et non pas dans les régions serbes conquises !), et par dessus le marché le gouvernement bulgare s'oblige définitivement et inconditionnellement à payer, quelle que soit l'issue de la guerre, les commandes faites en Allemagne et dont le montant s’élève à deux milliards de levas, ainsi que celles faites en Autriche de 400 millions de couronnes. Si l’on y ajoute les clauses scandaleuses concernant la Roumanie et son exploitation, on concluera sans peine que toute la politique de la Bulgarie est animée d'un seul désir, d’un seul principe : travailler pour l'Allemagne, travailler pour l'Autriche-Hongrie. |
Les fables bulgares sur leur «unité nationale » sont d'autant plus «dieuses que l’on voit la servilité avec laquelle les Bulgares vendent aux Allemands leur propre peau. Le traité de Bucarest est, pour la Roumanie, une capitulation imposée, mais une capitulation qui n’est nullement définitive, encore moins déshonorante. Pour la Bulgarie cependant l'acte de Bucarest signifie une capitulation morale, une déchéance du rang d'Etat indépendant pour devenir une province austro-allemande. Lors du règlement final des questions balkaniques l'Europe et l'Amérique tiendront certainement compte de cette facilité avec laquelle le peuple bulgare à accepté le rôle de mercenaire. Il faut espérer aussi que les peuples balkaniques, instruits par tout ce qui s’est passé entre 1913 et 1918, sauront éviter à l’avenir les erreurs qu’ils ont dû payer si cher! L. M.
Pourquoi intervint la Bulgarie
L'officieuse « Kambana », de Sofia. publie un article des plus instruclifs sur les raisons ide l'intervention de 1a Bulgarie à côté des puissances centrales :
« Mais le prestige que jouissail lAngleterre dans les entreprises maritimes, nous intervinmes, et c'est là que réside le pouvoir « moral » de notre intervention. Nous sommes entrés en guerre sans altendre el ainsi, pour notre avance en Macédoine, nous avons opéré une diversion. Gette diversion a contraint les Anglo-Français à retirer leurs troupes des Dardanelles et à les débarquer à Salonique. C'est ainsi que pour le plus grand bien des alliés, nous avons décidé le sort des Dardanelles. Après avoir fait nos préparatifs, nous S anmes intervenus avec la devise idéale: Si l'Allemagne doit périr, la Bulgarie ne 1itéile pas de vivre. Nous intervinmies non seulement pour réaliser notre union, mais faire triompher la grande cause germanique, car seule une Allemagne puissante nous garaniit un développement paisible.
Notre idéal est el restera toujours de coopérer avec l'Allemagne et d'aimer tout ce qui est allemand; ce, qui veut dire que pous serons fidèles à la quadruple alliance... On me change pas de politique çomme de Providence A
vêtements. La béni notre amour envers les Allemands el nous a procuré la possibilité de nous unir et de jouer un très grand rôle dans l'histoire imondiale. »
Pour sauver une race
De tout lemps, il y a eu des races el des peuples dont la mission a consisté à créer une civilisation ou bien à développer les progrès des civilisations déjà exis(antes. IL en ‘est d'autres dont lunique mission consiste à détruire ce que les autres races ou les autres peuples ont créé. Ainsi. en Orient, à la civilisation byzanline succéda la domination turque, laquelle à cinq siècles de distance lémoigne de la même horreur de la eullure el du progrès humain.
Lin récente destruelion de la bibliothèque de Bagdaa rappelle le fameux geste du sullan Omar ordonnant «ie mettre Île feu à la bibliothèque d'Alexandrie, Ia plus riche de lantiquilé. 3
[Il ne s'agit malheureusement plus setdlement de la destruction des imporlamès monuments d'une civilisation ancienne. Îl
s'agit maintenant de lexterminalion Svstémalique de foule une race, el encore
d’une race qui a peut-être le plus mérilé de l'humanité.
L'Hellénisme est en péril et ce péril est réel car toute lartivité des Jeunes-Turcs pendant les six dernières années s'est concentrée contre PHellénisme, qui représente l'élément le plus avancé socialement et le plus important en Turquie.
Les chrétiens de Turquie el plus spécialement les Grecs et les Arméniens qui ont eu la rare chance de survivre au ré sime du Sultan Rouge, pourront-ils survivre au régime actuel des massacreurs professionnels — Jeunes-Turcs — qui organisent des carnages permianents d’une façon méthodique et d'après des plans prépanés scientifiquement par leurs maîtres allemands ?
Les ünfortunés sujels chréliens, après avoir élé durant des siècles des esclaves, sont actuellement traités en ennemis et voués aux pires vexations. Elles n'ont foules qu'un seul but: lexlermination de toule une race, Les tortures qu’on leur fait subir sont indescriptibles. Elles sont tantôt individuelles, tantôt collectives suivant les intérêts et les caprices de ceux qui les ordonnent. Les déportalions, les expulsions en masse, l'enrôlement forcé dans les bataillons dits « de travail » sont les seuls « avantages » dont les malheureux chrétiens ont bénéficié sous le régime jeune-lurc.
Les documents qui se trouvent recueillis, dans diverses publications comme: « Deux ans de guerre à Constantinople » (Ed. Payot 1917), de Harry Sluermer, un Allemand, ancien correspondant de la « Gäàzelle de Cologne », « Les persécutions antihelléniques en Turquie » (résumé des rapports officiels. publié par le comité des libéraux hellènes de Lausanne), ainsi que l'ouvrage remarquable de M. À Mandelstamm « Le sort de empire otboman » (Ed. Payot 1917). en disent long sur l’œuvre néfaste entreprise par les Jeunes-Tures ayant pour but l’anéantissement des Hellènes de Thrace et de l’Asie-Mineure.
Les Bulgares, de leur eôlé, ne perdent pas {leur temps en Macédoine grecque, n'ometlant rien pour détruire définitivement toutes les traces de l'Hellénisme dans les régions occupées.
Il s’agit donc de mettre l'Europe en éveil contre les méfaits de deux peuples barbares qui s’acharnent contre des races qui leur sont infiniment supérieures.
Les Turco-Bulgares n'ayant pu s'approprier la culture serbo-hellène, s’attaquent à leur vie nationale et essayent de les exterminer. I s'agit done de l’anéantlissement des races les plus civilisées de l'Orient.
L’élite intellectuelle de la Suisse romande, composée d'esprits supérieurs el qui n'ont jamais menti à leur conscience, n'a pas voulu rester indifférente à un spectacle qui est un défi à la conscience universelle. {Cette élite se propose d'élever sa voix, comme elle Pa fait il y à une année dans une occasion analogue lors du recrutement forcé par les Bulgares en Serbie envahie: C'est pour soulager leur conscience el pour rester dans leur noble tradition que ees hommes d'élite ont entrepris de protester en une assemblée publique contre les horreurs et les atrocités des barbares modernes. Celte action noble: la défense et la protection des faibles et des opprimés, qui est dans les traditions de la Suisse. est Loul à l'honneur du peuple helvétique et dé ses chefs spirituels.
La faculté du peuple suisse de vibrer à toute injustice el d'élever la voix chaque fois qu'il s'agit d'un intérêt supérieur de l'humanité prouve le degré de sa conscience el la hauteur de sa culture.
L'amour de la justice, disait Gaston Paris, est le signe le plus noble el le plus
sûr de la civilisation. Cest à ce signelà que nous autres Serbes reconnaissons
toujours nos amis suisses,
M. D. M.
La situation parlementaire en Autriche
Un entr'acte
La siluation créée par lajournement du Parlement et l'annonce des mesures administralives en Bohême, s’est tout de suite éclaireie par rapport aux Tchèques et Yougoslaves.
La conférence commune des deux clubs, tenue le 7 mai sous le présidence de MM. Stanek et Korochetz, a voté une résolution énergique de protestalion contre la tenta tive du gouvernement de résouare, par la voie administrative el sans la participalion des représentants du peuple, les questions conslilutionnelles. Les Tcehèques et Yougoslaves proteslent contre l'institution des districts nationaux en Bohême ainsi que contre la séparalion projetée des pays slovènes du corps indivisible die Loute la; nation serbo-croate-slovène-et l'invasion allemande dans l’Adriatique. La protestation se termine par l'assurance que:les députés 4chèques el vougoslaves ne reconnaîlront jamais ces mesures, qu'ils repoussent avec la plus grande indignalion el qu'aucun acte de violence ne les :détournera de leur lutte pour l'indépendance. À la fin de la réunion qui. fut très animée, un comité spécial fut élu, composé de Tchèques el de Yougoslaves, pour préparer les mesures de défense contre les plans du gouvernement.
Les Yougoslaves ont tenu le même jour une réunion de leur club, pour protesler aussi séparément contre les procédés du gouvernement du Dr Seidiier. Dans la résolution adoptée à l’unanimilé le club yougoslave s'élève énergiquement contre les déclarations récentes du Dr Seïdler sur la question sud-slave : Le club protesle centre
l’idée même de la possibilité d'un Etat yougoslave viable, sans les territoires slovènes, Les Croates et Serbes tiendront jusqu'au bout à côté des Slovènes jusqu'à la réalisation dun État commun et indépendant,
Quant aux Polonais, ils n'ont pas encore pnécisé leur attitude. Le député démocratique Dr Lôüwenstein a soumis au Clul poïonais en son mom, une proposition inté. ressanie concernant la solution des questions intérieures et nationales en Autriche. On formerait un ministère d'affaires, qui ne s'occuperail que des affaires courantes, remeltant la solution des questions. nationales à l'après-guerre. Les nationalités au: raient la faculté d'élaborer leurs vues particulières sur la nouvelle orientation, mais le gouvernement ne sy mélerail en aucune façon, pour ne pas porter préjudice
au «slalu quo». Après la signalure de Ja
paix générale on procèdérait à la réorganisation de la Monarchie. Celle proposition n’a pas de chance d'aboulir, parce qu’elle ne salisfait personne. Les Allemands y voient une lenltalive d'entraver l'action dt
Housnenenl en Bohême, en faveur..de
llemands, les Tehèques et Yougaslaves en interprètes fidèles de leurs peuples, respeclifs, ont déjà défini leur point de vue el ils n'ont aucun motif d’ajourner
la réalisalion de Jeurs aspirations natio-
nalies.
Les Ruthènes ont eu une conférence avec le Dr Seidler, mais ils n'ont pris aucune résolulion. Ainsi, la silualion reste plus que confuse. et il semble que l'entreacte sera plus long que lon ne croyait d'abord. Les deux adversaires se mesurent, avant de passer à lassaut final.
La solidarité magyaro-bulgare
Le journal « Szegedi Naplo » a publié dans Son numéro du 5 avril un article caractéristique de Pantché Doreff, acluellement consul général de Bulgarie à Budapest : |
« Après l'assassinal de Sarajevo, éerit Doretf, lorsque ja guerre mondiale a éclaté, l'opinion publique de Bulgarie se rangea ouvertement du côlé de [a Monarchie. Le gouvernement bulgare proclama sa neutralité bienveillante, mais tout [e monde en Bulgarie savait déjà très bien que sa place esl à côlé des puissances centrales. »
Après avoir rendu hommage à l'amitié de l'Allemagne envers la Bulgarie, le consul général parle des sentiments de sympathie jde longue date existant entre la Monarchie danubienne et la Bulgarie.
« La diplomatie hungaro-autrichienne considère depuis longtemps avec bienveillance les tendances de Ja jeune Bulgarie. Cette bienveillance de la Monarchie, nous
en avons bénéficié dans notre lutte pour :
la liberté et particulièrement dans la question macédonienne, où la Monarchie danubienne nous a aidés non seulement par des conseils mais également par des actes.
« La sympathie mutuelle entre la Hongrie el la Bulgarie a cependant des racines très profondes. À la têle de ce mouvemient magyarophile puissant se trouve le Sage souverain de la Bulgarie, qui jouit de l’amour général... L'amilié bulgaroimagyare est la garantie la plus puissante de notre développement ullérieur, car la Hongrie et la Bulgarie sont également voisines de la Roumanie et de 1x Serbie. »
Doreff termine par un dithyrambe à la communauté indivisible entre les Magyars et les Bulgares. Les Magyars sont à même de comprendre mieux que personne les buts que poursuit la Bulgarie.
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FEUILLETON
Coup
d'émotion el rappelant des souvenirs personnels,
une influence quelconque sur les réponses qu'il rece-
À TRAVERS LA MACÉDOINE
TÉMOIGNAGE D'UN PUBLICISTE RUSSE
M. Alexandre Bélitch, professeur à l'Université de Belgrade, vient de publier dans « La Patrie Serbe » (Nos 3 4, de mars-avril) quelques notes très intéressantes sur le livre de M. V. Vodovozov : Dans Ja péninsule balkanique (Pétrograd 1917). M, Bélitch a jugé utile de faire connaître au public européen, si grossièrement trompé par la propagande bulgare, l'opinion d’un savant impartial sut la Macédoine et son caractère éthnique. Cette opinion est en ‘effet d'uné importance particulière, car.elle se base sur l'enquête personnelle de l'auteur dans les régions contestées. Nous reproduisons ici quelques passages du livre de M. Vodovozov, d'après l'article mentionné de M. Bélitch : 1 +
Vodovozov avait sur la question $erbo-bulgare un point de vue tout particulier. Il n'était ni pour les Serbes ni pour les Bulgares, mais il a cté en rapports étroits avec les uns el avec les autres, ce qui lui. a permis de bien examiner leurs désirs el leurs aspirations, qu’il aurait pu plus tard comparer avec l'état réel des choses dans ces pays et fixer ainsi l'opinion qu un. homme sans partipris doil avoir sur Ja question de la Macédoine, tant jaie fois discutée.
Il me lui manquait ni connaissance mi préparation. Déjà, avec le professeur Yastrebov, il avait écrit l'Histoire de la Bulgarie et avaïl suivi de près pendant longtemps, tous les mouvements qui s'étaient produits en Bulgarie, en Macédoine «et en Serbie; il avait surtout suivi le développement du socialisme dans {ces pays el avait trouvé parmi ses représentants des plus en vue, des amis chez lesquels il se renseignait sur tous les nouveaux évènements. Lorsque, en 1915, Jean Sandanski fut tué en Bulgarie (près de Névrokop)}, Vodovozov traça, avec beau-
y
un portrait très vivant du révolutionnaire macédonien.
En 1915, quand de {conflil entre les Serbes et les Bulgares atteignit son point le plus aigü, Vodovozov s'adressa à peu près dans ces termes à-chacun deS partis: «Vous ne parlez que de vos ‘prétbenlions sur la Macédoine, de vos droits historiques, æethnographiques, linguistiques el civilisateurs: ce n’est pas dà Le principal, disaitil, et ce n’est pas ce qui doil intéresser, à l'heure actuelle, tous mes concitoyens; diles-moi plutôt ce que désirent ce que pensent, ce que veulent les Macédoniens. »
Bien entendu, les Serbes et les Bulgares répondirent, chacun de leur côté, qu'ils étaient les interprètes fidèles des désirs et des volontés «es Macédoniens qui vou-
laient être réunis soit à la Serbie, soit à la Bulgarie;
Vodovozov comprit alors clairement :qu'il ne pourrait avoir une réponse exacte que des Macédoniens eux-mêmes, el non pas de ceux qui avaient déjà reçu une éducation serbe ou bulgare et qui étatent devenus, par là, les champions des aspirations serbes où bulgares, mais de ceux qui demeuraient dans le pays en restant en dehors @e toute influence. : L Vodovozov, qui plaçait très haut son devoir de publiciste, n'a pas voulu, comme représentant de la conscience publique de son pays, écrire quoi que ce fût sans une vérification exacte sur plaie. Il se rendit, via Sofia, en Macédoine, et de décembre 1914 à janvier 1915, il effectua à travers le pays un voyage où il s'efforça de voir (l’état réel des choses. Il s’appliqua surtout à rester indépen-
dant dans son travail et ne permit À personne d'exercer
vait. Du reste, Pobservalion directe et une étude approfonde des évènements de Macéuoine pouvaient lui fournir des renseignements plus précieux que ceux que lui auraïent offerts les entretiens avec les habitants; bien entendu, il fallait savoir observer et voir.
Son voyage eut comme résultat la publication d’un article intitulé « À travers la Macédoine ;serbe». {« Vestnik Europy », No 1, année 1916), qu'avec d'autres articles de journaux
et de revues trañtant le même sujet il réunit en un livre.
spécial publié sous ce titre: « Dans la Péninsule balka nique » (Pétrograde 1917) Voici quelques passages importanis de ce livre:
« Le travail civilisateur accompli par le gouvernement serbe et Pespoir dune réforme agraïre ont favorablement influencé les habitants de la Macédoine serbe pour $e
\
rallier au régime serbe jen dehors de ftoute pression nalio- M nale. Quant à cette pression, forte au début, mais bientôt
très affaiblie, elle finit par disparaître complètement, Car le sentiment national des Macédoniens ne fut jamais mi profond, ni bien établi. Lorsque les éléments de. trouble bulgares, qui, en tout cas, ne représentaient qu'une minor rité de la population, quittèrent le pays, les autres Slaves sans aucun effort, consentirent à devenir Serbes (p. 90) *
« La Serbie à créé en Macédoine la sécurité personnelle complète; elle a remplacé entièrement le système baïbare d'impôls {ures par un système moderne: telle à établi toute une série de bonnes routes et s'est préparée à construire out un réseau de chemins de fer; elle 4 couvert toute la région d'excellentes écoles pour l'ensei-