La vente des biens nationaux pendant la Révolution française : étude législative, économique et sociale : ouvrage accompagné de deux plans
14 LA NATIONALISATION
ment lui-même n’est-il pas proclamé donataire et acquéreur ? N'est-ce pas avec l'autorisation de la loi que ces établissements, qui ont reçu une existence légale, sont nés, et ont pu donner leurs biens à ferme, les vendre, et échanger sous certaines formalités, les cultiver, bâtir !, etc. ?
Il répondit ensuite aux objections de Thouret. Prétendre que la loï qui a tout donné à la personne morale pouvait toutlui ôter, c’est émettre un principe faux. La propriété en effet ne peut avoir de base que la loi; où il n’y a pas de loi, il n’y a que force et violence, et une juste propriété ne peut être fondée ni sur la force ni sur la violence. Les individus et les corporations sont à cet égard dans la même classe, et si la nation pouvait enlever la propriété aux corporations, elle pourrait l’enlever également, et par la même raison aux individus; or elle ne peut rien enlever aux uns et aux autres, parce que ses opérations sont stables et permanentes. Elle ne peut non plus les anéantir arbitrairement, parce que l’idée de loi et d’arbitraire sont deux idées inconciliables. De ce qu'on a défendu d'acquérir, il ne s’en suit pas qu’on puisse défendre de posséder. N’y a-t-il aucune différence entre enlever ce qu'on a, et ne pas permettre de s’enrichir ? Défendre d’acquérir est une loi de police, ôter est un acte de violence.
1. Séance du 13 octobre 1789.