Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

DEUXIÈME PARTIE. — CHAPITRE VII 149

à la lanterne de ses persécuteurs : « Lisez, Ô Français! mes concitoyens, dit-il dans sa préface à la Nation, lisez le dévoilement du despotisme léthifère de nos anciens ministres, lieutenans de police et directeurs généraux qui ont pris la fuite avant et aprés la Révolution ! Leurs complots, leurs machinations, leurs entreprises, leurs ligues, leurs conjurations, leurs forfaits aussi innombrables qu’inextricables, laprovoquaient depuis trop longtemps, et ils redoutaientle sort des Berthier, des Foulon, des Launay, à plus juste titre qu'eux encore. Ils ne pouvaient même, par grâce, échapper à la fameuse lanterne ; et cependant, leur émigration précipitée les a délivrés de tous maux, de tout supplice et de toute infamation publique, sans qu'on se soit avisé de poursuivre leurs personnes, ni de décrèter les biens qu'ils ne pouvaient emporter avec eux. Que pensez-vous de cela ? N'était-ce pas favoriser leur retraite et leurs crimes multipliès de lèse-nation, de lèse-majesté et de lèse-humanité? »

C'est chez lui une idée fixe : la confiscation des biens de ses persécuteurs, leur mort et le partage de leur fortune, naturellement à son profit. Il revient constamment à celte demande. « Par quel privilège te laisser jouir aujourd'hui si tranquillement de tes rapines, dit-il en s'adressant à Laverdy, lorsque tes parents et tes associés ont pris la fuite ? Pourquoi ne te condamnerait-on pas à m'indemniser de vingt-deux années de captivité que ta ligue abominable m'a fait endurer dans cinq prisons ?.. Ceux qui ont été accrochés à la lanterne étaient-ils plus criminels que tot ? Es-tu donc un individu plus précieux à l'État que moi? Et puisque la nation est maintenant assemblée pour punir les crimes, faire des loix, anéantir les abus, rendre la liberté, pourquoi ne confisquet-on pas tes biens et ceux de les collègues fugitifs, non seulement aux (sic) pauvres que tu as faits, mais principalement à ceux qui ont soujff2rt pour les énormes forfaits ?.…. » Et plus loïn (p. 16), il demande qu'on aille les chercher même à l'étranger, et qu'on les enferme au donjon de Vincennes, qu'on confisque leurs biens « tant au profit des pauvres qu'à /ndemniser principalement ceux qu'ils ont perséculés, piliés, volés COMME LUI ? » Il regrette (p. 20) de ne pas avoir été à Evreux quand de Grosne « s’y est vu arrêter en fuyant ! Il ne lui aurait pas échappé ! » Il ne termine pas sa brochure sans revenir à son idée fixe : « Maintenant qu'il ne me reste d'autre bien que de jouir de la lumière, sur la fin de mes jours,

1. Pris. d'Etat, p. 8.