Le Royaume de Monténégro : avec une carte
98 LE ROYAUME DE MONTÉNÉGRO
un simple entrepôt des quelques marchandises destinées au pays.
Le relèvement de l’industrie pourrait se faire avec moins de frais. La laine, produite dans le pays en assez grande quantité, pourrait être économiquement manufacturée dans des filatures, et transformée, sur place, en draps pour l'habillement de la troupe.
Si un industriel avisé se décidait à créer au Monténégro filature et tissage, il pourrait être certain de réaliser de beaux bénéfices.
On pourrait en dire autant d'une manufacture de chaussures, d'une tannerie, d’une fabrique de ciment, etc., qui prospéreraient sûrement et qui contribueraient, en fournissant régulièrement du travail à de nombreux ouvriers, à diminuer un peu la misère.
La houille se payant fort cher au Monténégro, la force motrice pourrait être fournie par le pétrole, ou, plus économiquement encore, par la captation des eaux partout où cela serait possible.
Et, si un jour on se décidait à explorer le sol, peut-être ces travaux auraient-ils pour résultat la découverte de houillères!
Au point de vue militaire, le Monténégro saura se garder, n’en doutons pas, et ses monts défendent bien leurs habitants. Le Monténégrin, seul, peut tirer parti de ces rocs dont l’ascension lui est familière : une poignée de tirailleurs d’élite derrière une grosse pierre fera reculer un bataillon ennemi.
Si l'Autriche ou la Turquie voulaient lui déclarer la guerre, le Monténégro ferait appel à la Russie, qui, certainement, ne resterait pas inactive. Il faudrait donc mettre sur pied des forces considérables, et l'expérience a démontré que, même dans ce cas, le succès de l’entreprise serait très problématique. Le danger d’une invasion est donc chimérique.
Le seul danger serait que l’Autriche prenne le parti de cerner le royaume et d’acculer ses habitants à la famine, car les soldats de Nicolas Ier ne pourraient pas franchir la ligne de forteresses qui s'étend le long de la frontière autrichienne.
En cas de conflit avec la Turquie, les Monténégrins entreraient sans obstacle à Novi-Bazar, place turque isolée à l'extrémité de l'empire ottoman, et qu'une armée de secours n’atteindrait que difficilement. Une attaque des Turcs eût été plus facile autrefois, en raison de l'existence d’une Bulgarie et d'une Bosnie turque