Le Royaume de Monténégro : avec une carte
30 LE ROYAUME DE MONTÉNÉGRO
Cette aventure est de date récente; elle s’est passée, il y a quelques années seulement, et de semblables scènes se répètent encore tous les jours.
Quelqu'un se vante-t-il de son courage et raconte-t-il ses prouesses? Alors un autre gaillard du village l’interrompt en lui disant : « Vous croyez-vous plus courageux que moi ? » En cas d’une réponse affirmative, deux coups de revolver retentissent et, s’il y à une victime, la vendetta commence.
Une grave offense consiste à appeler quelqu'un « coucou », parce que cet oiseau est peureux.
Les officiers règlent leurs différends devant un conseil d'honneur, bien que, souvent, ils se laissent entraîner par la colère et échangent des coups dès qu’une querelle surgit. Tuer une femme est un crime qui viole les règles de la vendetta. Si une femme a tué un homme, parce que les circonstances l’ont voulu, ce n’est pas elle qui est responsable, mais son mari. Toute la famille de celui qui a tué une femme est responsable; par contre, la vengeance n’est pas permise à cette dernière, sauf dans le cas où aucun parent du sexe masculin ne se trouverait là pour poursuivre la vendetta. Elle s'habille alors en homme et part à la recherche de son offenseur. La vendetta met souvent le Monténégrin dans une situation assez fâcheuse, car, s’il ne se venge pas, le gouvernement le punit pour son manque de courage, et, s’il se venge, il sera également puni et emprisonné. La famille doit alors s'acquitter de la dette. La vendetta règle nombre d’autres affaires, entre autres l’enlèvement de la femme d'autrui, et les expressions insultantes de «bélier » ou bien « d'âne sans tête», crimes impardonnables. On peut être sûr que l’offenseur sera mis à mort ou, si ce n’est lui, ce sera un de ses parents. La vendetta est strictement défendue pendant la messe et les jours de foire.
Les Monténégrins communiquent entre eux à de grandes distancés, au moyen de sons spéciaux qu'ils tirent de leur gosier, et ils s’exercent dans cet art, dès leur première jeunesse. Les étrangers, qui n’y comprennent rien, admirent, ébahis, leurs gestes et surtout la puissance de leur organe. Ils sont aussi très forts sauteurs. Le saut de 6 à 7 mètres est exécuté avec la plus grande désinvolture et sans efforts.