Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

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sistible qui l’entraînait vers le théâtre Feydeau (1).

Une lettre adressée à l’occasion de cette tragédie d’Abufar, par Ducis à Talma, nous montre de quelle cordialité étaient empreintes les relations entre l’auteur et l’artiste, et quel soin scrupuleux ils apportaient tous deux à monter cette œuvre dramatique avec toute la couleur locale exotique qu’elle comportait: « À Paris, le 29 thermidor an Il° de la République Française

(16 août 1794.) r

« Vous trouverez sur la feuille suivante, mon cher « Farhan, le programme de la décoration dont nous « avons besoin pour notre Famille Arabe. Songez que « d'hier vous êtes un Arabe Bédouin, c’est-à-dire en« fant du désert.

« Il vous faut avoir une nature libre et sauvage.

« Pressez, je vous prie, notre décoration. J’ai à « cœur de voir l'effet de mon Abufar sur la scène. Je « serai toujours prêt à me concerter avec vous sur « les choses que vous pourriez souhaiter dans votre « rôle qui est assorti à vos organes et à votre taille, « et à votre teint et à votre physionomie, et à votre « marche et à votre geste! Songez aussi à votre cos-

(1) Voici en quels termes Ducis faisait connaître à sa femme le succès de cette pièce :

À MA FEMME Sur ma tragédie d'Abufar ou la Famille Arabe.

O ma compagne! apaise ton effroi.

Notre Abufar a fait verser des larmes.

De son succès je goûte tous les charmes,

En envoyant ces fleurs que je recçoi.

Leur doux parfum n’est point éclos pour mot Dans l'Arabie ou déserte ou pierreuse.

Mes vers ont plu; mais je sens bien pourquoi : Ma tendre amie, ils sont nés près de toi;

Je les ai faits dans l’Arabie heureuse.