Les fêtes et les chants de la révolution française

CHAPITRE VI

LA FÊTE DE L’ÊTRE SUPRÊME

I

La deuxième décade après la fête de la Raison était à peine commencée quand, le soir du 1° frimaire, Robespierre s’en fut aux Jacobins où il condamna hautement l'athéisme et proclama « l'idée populaire d'un grand Être qui veille sur l'innocence opprimée et punit le crime triomphant ». Le 22 du même mois (et dans l'intervalle avait été signé le décret du 1# frimaire qui organisait le gouvernement révolutionnaire en dictature), il revient à la charge, et attaque de front ceux qui avaient été les instigateurs du culte de la Raison. La réaction fut si complète, le discrédit si absolu que bientôt l'on n’entendit plus que des paroles de mépris là même où la Raison était célébrée naguère. Le même jour, à la barre de la Convention, Payan s’indignait en parlant de cette nouvelle mythologie « plus absurde que celle des anciens », des « déesses plus avilies que celles de la Fable », qu'on avait pu voir la veille « jouer le rôle de Vénus », tandis qu'aux Jacobins Collot d'Herbois se déclarait scandalisé par le spectacle de « cette raison postiche qui courait les rues avec les conspirateurs,