Lettres inédites de Frédéric Gentz à sir Francis d'Ivernois (1798-1803)

VIII

Monsieur !

J'ai attendu avec la plus grande impatience la lettre que vous avez eu la complaisance de m’annoncer pour le 20 mai, et les livres qui doivent l’accompagner. Mais vous avez pu être, je dirais presque, assez cruel, pour ne pas satisfaire au désir si naturel et si vif que vous aviez fait naître. Jusqu'ici je ne vous en ai point adressé de reproches, parce que je croyais fermement que l’arrivée de Lord Carysfort! à Berlin serait enfin le moment qui réaliserait ce que j'avais espéré depuis si longtemps; mais Lord Carysfort — et ce fut vraiment la première question que je lui adressai — ne ma rien apporté. Permettezmoi donc, Monsieur, de vous faire parvenir à la fin les plaintes amères que m’inspire naturellement un retard si fâcheux du plaisir dont je comptais jouir d’une semaine à l’autre. Veuillez seulement considérer que je n'ai pas encore vu votre dernier ouvrage?, publié depuis quatre ou cinq mois; et si tout ne conjure pas contre nous, saisissez, je vous prie en grâce, la première occasion pour exécuter ce que Vous avez eu la bonté de me promettre.

En attendant je vous présente ci-joints les derniers cahiers de mon journal, dans lesquels j'ai traité l'éfat des finances françaises depuis le 18 Brumaire *. Je dois m'être rencontré nécessairement avec vous sur bien des points, et j'en suis d’autant plus curieux de lire et d’étudier votre dernier ouvrage. Mais ce qui m'intéresse particulièrement, c’est de savoir ce que vous direz du morceau par lequel j’ai terminé mes calculs. Je crois que nous sommes enfin arrivés au moment où, au lieu de

1. John Joshua Proby, earl of Carysfort (1751-1828), homme d'État anglais, nommé plénipolentiaire à Berlin le 24 mai 1800, poste qu’il occupa jusqu’en octobre

1802. : >. D'Ivernois, Des causes qui ont amené l’usurpation de Bonaparte et qui

préparent sa chute. Londres, 1800. 3. Historisches Journal (juillet et août 1800). Uebersicht der Franzôüsischen

Finangen seit dem 18ten Brumaire.