Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

152 LA CRISE EUROPÉENNE ET L'EMPEREUR ALEXANDRE. -

tion qu'excitaient à Paris les événemens de Madrid) a pris une attitude plus forte; une majorité. s’est formée pour le soutenir. Les ministres sont unis et marchent dans le même sens. Le duc de Richelieu se livre avec zèle et sans faire paraître de l'inquiétude à ses importantes fonctions... Le baron Pasquier a dit ces jours derniers de lui qu’il ne le reconnaissait pas, qu’il n’était plus le même, qu'il remplissait ses devoirs avec autant de courage que d'activité, qu'il allait d’un de ses collègues chez l’autre pour s’entretenir avec eux de tout ce qui lui paraissait être de quelque importance, et qu’il s’occupait particulièrement avec-le ministre de la guerre des moyens de donner un bon esprit à l’armée... La loi sur les journaux sera adoptée selon toutes les apparences. Il n’y a guère que le vicomte de Chateaubriand et deux ou trois autres écrivains royalistes qui ont assez d'amour-propre pour croire que leurs écrits, quoiqu'ils aient fourni évidemment à leurs adversaires tant de prétextes et de motifs pour attribuer aux royalistes de mauvaises arrière-pensées, ont produit un bien infini... L'auteur sus-nommé est tellement aveuglé sur ce point, qu’il a même cru devoir voter... contre la nouvelle loi sur les journaux, tandis qu’un républicain, M. Gallatin, ministre des États-Unis d'Amérique, qui passe avec raison pour une des meilleures têtes politiques, n’hésite pas à dire qu’il croit l'établissement d’un gouvernement absolu ou représentatif, légitime ou illégitime, en France, incompatible avec la liberté illimitée de la presse... J'ai cru devoir me rendre, peu de jours après l’arrivée du rescrit n°9, chez le duc de Richelieu pour lui dire tout ce que ce rescrit renferme d’agréable pour lui. 11 y a été extrêmement sensible, et, après m'avoir prié d’en témoigner sa profonde reconnaissance à votre majesté, il fit la remarque qu’il désirait que les cours étrangères voulussent cependant bien avoir, en considération des grandes difficultés qu’elles ne pouvaient méconnaître, quelque indulgence pour lui. Il m'a montré au reste de nouveau à cette occasion le courage d'esprit si nécessaire à un homme d’état dans les graves circonstances actuelles, en me disant entre autres choses que la lutte était établie entre le génie du bien et le génie du mal. Au sujet des plénipotentiaires des cours étrangères, il me dit encore que nous ne pourrions mieux aider le gouvernement français qu’en n’en ayant pas l'air, parce que, la nation française étant la plus vaniteuse du monde, tout prétexte trouvé pour faire croire à une influence étrangère ne pourrait que nuire à la marche du ministère. Je lui répondis que je n’avais eu que trop d'occasions de remarquer le mal que Fon a su faire en attribuant une grande importance personnelle à l’un ou l’autre des ministres étrangers, et que toute ma conduite... devait lui avoir montré combien je partageais son opinion sous ce rapport. It répliqua bien vite que ce qu’il disait ne m'était aussi nullement applicable, et que pérsonne ne savait mieux apprécier que lui la sagesse et la prudence avec lesquelles le baron de Vincent et moi nous nous étions constamment conduits. J'ai vu, dans cet entretien,.… que le duc de Richelieu, sans supposer que le duc Decazes puisse un jour rentrer dans le ministère, le regarde cependant toujours comme un obstacle à une marche plus assurée et à une attitude égale du gouvernement français, particulièrement vis-à-vis des autres cours alliées. Je me suis aperçu malheureusement aussi que j'ai eu trop bonne opinion des réflexions que sir Charles Stuart semblait avoir faites sur sa position relative aux circonstances