Louis XVI et la Révolution

6 LOUIS XVI ET LA RÉVOLUTION.

Mercy, faiblesse, mais clairvoyance. Lorsque les intérêts de l'Autriche sont en jeu, Louis XVI sait que la Reine est de mauvais conseil; il tâche de se dérober à ses instances, il écrit à Vergennes, le 11 avril 1775, cette lettre qui dénote un solide bon sens politique : « Je vous envoie, Monsieur, la dépêche de M. de Saint-Priest. Je ne crois pas que la maison d'Autriche entende son intérêt, en ne voulant pas demander la liberté du commerce de la mer Noire. Toutes les démarches que ce cabinet fait depuis quelque temps sont bien obscures et bien fausses. Je crois qu’il est embarrassé de ses nouvelles usurpations en Moldavie, et qu’il ne sait comment se les faire adjuger : la cour de Russie les désapprouve, et la Porte ne consentira jamais à les céder à l'Empereur. Je ne crois nullement à ce nouvel accord avec les cours copartageantes. de les crois plutôt en observation vis-à-vis les unes des autres, et se défiant d'elles mutuellement. L'avis de M. de Lauzun me confirme dans ma pensée pour ce qui est de l'invasion que les troupes de l'Empereur ont fait dans l'État de Venise. Je n’y vois nulle raison, mais la loi du plus fort est toujours la meilleure. Elle dénote bien le caractère ambitieux et despote de l'Empereur, dont il ne s’est pas caché au baron de Breteuil. Il faut croire qu'il a su fasciner absolument les yeux de sa mère, car toutes ces usurpations n'étaient pas de son goût. »

Pour la politique étrangère, Louis XVI n’est donc pas, au début, le très humble serviteur de Marie-Antoinette. Sur le reste, tout en laissant la reine faire à peu près tout ce qu’elle veut, il ne l’imite pas dans ses folies, surtout dans sa passion du jeu. Il ne dissimule pas sa mauvaise humeur quand il apprend que Marie-Antoinette a perdu cent mille écus dans une seule soirée : « C’est une revanche, dit la reine, en guise d’excuses. — Avec de telles revanches on se ruine, » répond fermement le roi. Il renvoie à leur régiment des jeunes gens qui jouent trop gros jeu. Sachant qu'on guette son départ pour commencer la partie sérieuse, il sort, puis rentre à l'impro-