Louis XVI et la Révolution

10 LOUIS XVI ET LA RÉVOLUTION.

En 1775 le roi de Suède, dans une disette, lui offre du blé : Louis XVI refuse, parce que le danger est passé; on a calmé une émeute fomentée par quelques scélérats : « les paysans entrainés par eux, et par la fausse nouvelle de la diminution du pain qu’on avait eu soin de répandre, s’y sont joints, et ont eu l’insolence de venir piller les marchés de Versailles et de Paris, ce qui m'a forcé à faire approcher des troupes qui ont rétabli le bon ordre sans peine. Après le déplaisir extrème que j'avais eu de ce que le peuple avait fait, j'ai eu la consolation de voir que d’abord qu'ils ont été détrompés, ils ont rapporté ce qu’ils avaient pris, avec une véritable peine de ce qu'ils avaient fait. »

Cette parfaite bonté de cœur élève cet esprit pesant jusqu’à une certaine hauteur; cet homme médiocre en arrive ainsi jusqu'à comprendre et à respecter même le génie littéraire, jusqu’à penser et à écrire ceci: « J'ai toujours regretté que les œuvres de ces beaux génies qui deviennent l'honneur et le patrimoine de la nation, laissent sans aisance leurs descendants, quand tant d’autres s’en enrichissent. Ce que j'ai fait il y a emq ans, pour régler les droits des auteurs, est loin malheureusement d’avoir obvié à tous les inconvénients de ce genre. »

Son visage épais est à certains moments comme transfiguré, au témoignage de Gustave III et de la baronne d'Oberkirch : «Son âme, dit cette dernière, a une sérénité qui rayonne. » Et, si l’on se défie en pareil cas de l’affirmation d’un roi et d’une royaliste, voici le froid et posé Baïlly qui nous dit dans ses Mémoires : « C'était la première fois que je voyais le Roi et que je lui parlais seul... J'emportai une grande conviction de sa bonté naturelle. »

Louis XVI fut du reste payé avec usure de cette bonté, de ces bonnes intentions, par une popularité personnelle prodigieuse, qui lui aurait permis de faire de grandes choses, si chez lui l'esprit avait été à la hauteur du cœur. On l’aimait d’un bout à l’autre du royaume. Il s’en étonnait même, pendant