Mémoire sur la Bastille

46 MÉMOIRES SUR LA BASTILLE

diatement après le 16 avril, n’en est-il pas une de la plus criminelle espèce !

Quoi! l'on continuoit à répandre dans le public, sous la garantie de l'autorité royale, un ouvrage dont l’auteur étoit proscrit secrètement, et dévoué par les ministres à l’opprobre, aux rigueurs réservées pour les ennemis du roi et de l’État! On continuoit à le recevoir pour le remettre au roi; on le lui remettoit; on feignoit d'applaudir aux marques de satisfaction dont il continuoit de lhonorer ; on avoit soin de m’en informer !

Le même organe par lequel transpiroient jusqu'à moi les nouvelles d’une approbation si flatteuse étoit employé à m'attirer à Paris. L’espion masqué en ami que la police pensionnoit, à mes dépens, depuis cinq ans, pour pénétrer dans mes secrets, instruit que je n’ignorois pas celuilà, ne cessoit de combattre l’effroi qu'il m’avoit inspiré, par cette considération qu’on n’auroit pas rendu la liberté aux Annales si on avoit voulu l'enlever à l’auteur, et que je pouvois sans crainte venir en France, puisque mes ouvrages étoient si bien accueillis à Versailles. On faisoit ainsi servir un nom sacré à faciliter le succès d’une iniquité dont ce même nom devoit être l’instrument !

Elle n’a eu lieu qu’au bout de six mois; mais au bout de six,ans, de vingt, la lettre de cachet qui lordonnoit auroit eu la même efficacité. J’étois,