Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

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reproche amer que l’on ne me voyait plus’. Ces paroles me glacèrent avec d'autant plus de raison que je n’avais rien fait pour les mériter, et qu'auparavant, chaque fois que j'avais eu l’honneur d'approcher Sa Majesté, j'en avais toujours éte traité avec bonté. De ce moment je ne doutai plus que j'avais encouru sa disgrâce, que je ne puis qu’attribuer à ma rentrée en France.

Il est bien dur pour un chef, et surtout pour un ancien militaire qui a toujours servi sa patrie avec un zèle et une probité à toute épreuve, de recevoir un semblable refus de son souverain, dans un moment où il se croyait en droit d'espérer ses grâces. Je n’en résolus pas moins, quel que fût mon chagrin, de continuer mon métier comme je l’avais toujours fait, et de prouver dans l’occasion, si la guerre recommençait, que je savais mourir au champ d’honneur comme j'avais vécu.

Le lendemain 5 août, d’après les ordres de l'Empereur, plusieurs divisions du corps d'observation partirent de leurs cantonnements pour se rendre à Dresde?, en passant par Hof, Plauen, Zwikau, Chemnitz et Freyberg * où notre division reçut l’ordre de se diriger dans les environs de Dohna, à quatre lieues de Dresde.

L’armistice devait cesser le 15 août, et, si le résultat du Congrès de Prague n’était point pour la paix, les hostilités devaient recommencer le 18.

Nos divisions reçurent en conséquence l’ordre de se rapprocher de la Bohème, le 13, pour garder la ligne.

© Le Roi Soleil au milieu de sa cour et l'empereur soldat au milieu de son état-major, si différentes que soient les circonstances, rencontrent singulièrement la même expression de l'enivrement du moi.

? Sous les ordres du maréchal Gouvion Saint-Cyr.

Là doiventse réunir les troupes formant le XIVe corps qui gardera Pirna et la gauche de l’Elbe. On marche sans relâche, car les hostilités reprendront le 18, On n'a pas réuni de vivres.