Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

218 MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

Je retournai à Albi mon domicile’, où j'avais fait bâtir une maison qui me coûtait 25,000 francs.

Ayant sollicité pour mon fils une place d'élève gratis à l’école royale de la Flèche, je l’obtins de la munificence du roi. Je partis le 1* mars, et m’empressai de le conduire à la Flèche. Arrivé à la Rochelle, les agents de : la police, à ma grande surprise, vinrent à minuit m'interroger pour savoir quel était le but de mon voyage. Leur ayant présenté l'ordonnance du roi et la lettre du ministre de la guerre, ils se retirèrent. Vers les deux heures du matin, ils revinrent m'interroger : encore plus surpris de cette seconde visite, je leur demandai s'il y avait quelque chose de nouveau en France. Le chef me dit tout bas que le bruit se répandait que Napoléon était débarqué à Fréjus?, et me conseilla de prendre un passeport à Nantes, chose que je fis à mon passage dans cette ville, et que j'obtins sans difficulté, après avoir été questionné sur différentes choses, et avoir exhibé les pièces dont j'étais porteur. Je vis afficher les proclamations du roi qui annonçaient le débarquement de Bonaparte, et qui ordonnaient aux officiers . de tout grade en non-activité de se rendre sur-le-champ à Paris pour recevoir de nouveaux ordres*, Je m’empressai de quitter Nantes, afin de déposer mon fils à l'école de la Flèche, Je partis le lendemain pour la capitale, où j'arrivai le 21 mars. Quelle fut ma surprise

: V. À 25, aux notes.

? Ce fait, connu à Paris le 5, y fut caché un jour. Il fut connu à Bordeaux dans la nuit du 8 au 9. Godart n'arriva donc à la Rochelle que le 9. Il avait fait ce détour probablement pour y voir le parent de sa femme, le colonel Guyot-Duclos, directeur du génie à la Rochelle, commandeur de la Légion d'honneur.

* Proclamation du maréchal Soult, ministre de la guerre, datée du 9 mars.