Orateurs et tribuns 1789-1794

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L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA DROITE. 117

garda point rancune à Dumas de sa franchise, puisqu’à la mort de Malouet, il le recommanda pour le portefeuille de la marine. Aussi bien le maréchal Oudinot avait dit au roi dans le même sens: « Sire, la cocarde nationale est aujourd’hui pour votre Majesté ce qu'était la messe pour Henri IV. » Et un bel esprit ne dépeignait pas moins bien la situation dans cette formule ingénieuse : « Tout ira bien s’il vient chez nous; tout ira mal s’il vient chez lui. »

Les Souvenirs de Dumas nous instruisent d’une nouvelle espèce de divorce introduite sous la Terreur, le divorce provisoire par mesure de prudence. Cédant à ses instances, madame Dumas, vers 1794, se détermina à divorcer. On la conduisit à l'Hôtel de ville déguisée en femme de la halle, avec un bonnet rond et des sabots, et quand elle exhiba les pièces exigées, le municipal lui tint ce beau discours : « Citoyenne, tu portes là un vilain nom, et tu as bien raison de changer ce maridà pour un autre. » Lui, cependant, passait les mois infernaux, les temps de la grande épouvante, dans la retraite, en France, puis en Suisse, plus tard à Hambourg dans le Holstein, relisant Tacite, Horace, Montesquieu, apprenant l'allemand et écrivant des Mémoires. Pendant sa première proscriplion, il vint de nuit frapper à la porte d’un château où s'étaient cachés madame de Lameth, madame d’Aiguillon et Théodore de Lameth : il avança la tête vers les croisées du salon et

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