Poussière du passé : (notes et tableaux d'histoire)

12 POUSSIÈRE DU PASSÉ

tion poussant au même degré que la France, à cette époque, l'oubli de sa force et l'abandon de ses droits. Les enragés, comme on les appelait, puisèrent leur puissance non dans leur courage, mais dans l’abstention et la mollesse de la grande majorité du peuple de Paris. Dès 1790, les autorités municipales étaient dans la nécessité de reconnaître que les agitateurs appartenaient à la catégorie des gens sans patrie, sans asile et sans aveu. Cet état de choses rapidement s’aggrava. Aux plus mauvais jours de la Terreur, le nombre des chefs du mouvement, héros des cafés, orateurs ordinaires des clubs et des sections, membres du comité central, ne s’élevaient pas audessus de deux cents. C'était toujours eux qu'on voyait aux Tuileries, aux Feuillants, au Palais-Royal, aux Champs-Élysées, aux boulevards, sur tous les points qu’ils avaient conquis pour en fairele théâtre de leurs ardentes forfanteries. Autour de deux ou trois d’entre eux, se groupaient souvent des modérés qui se laissaient contraindre à applaudir aux motions les plus incendiaires, alors que d’un mot, ils auraient pu les étouffer, et qui arrivèrent à subir docilement

un joug qu'ils maudissaient.