Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
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la force. Personne ne savait encore, parmi eux, que les représentans du peuple sont le premier des pouvoirs.
Le roi et la cour étaient à Marly pour huit jours. M. Necker était auprès de sa belle-sœur mourante à Paris; et la cour tenait des conciliabules où se formait le plan insensé qu’on vit éclater bientôt après. On dit que l’archevêque de Paris alla se jeter aux pieds du roi pour lui représenter que son autorité était perdue et l'état renversé, s’il ne prenait des moyens prompts ets’il ne dictait aux communes les volontés suprêmes de leur souverain. Cependant on persuada au roi qu'il ne pouvait manquer de discréditer entièrement l'assemblée nationale en accordant lui-même à ses peuples presque tout ce qu'ils avaient demandé. On lui représentait qu'il était chéri de la nation, qu’elle s’estimerait heureuse de tenir en un jour de ses bienfaits ce qu'elle aurait peine à obtenir de ses représentans; que ceuxci, en s’opposant à des intentions si paternelles, prouveraient à tout le monde qu'ils n'étaient que des factieux, et qu'ils seraient perdus dans l'opinion publique. Mais, tandis qu’on le séduisait par des motifs propres à agir sur son cœur, on lui faisait sentir la nécessité de faire approcher des troupes pour en imposer au peuple de Paris, dont les mouvemens paraissaient à craindre. Aïnsi se faisaient tous ces préparatifs secrets, tandis que les citoyens, ivres de VPaliégresse publique, avaient conçu pour l’assemblée nationalé une admiration et un respect propotionnés à son courage.
Le 20 juin, trois jours après que l’assemblée nationale se fut constituée, les membres du clergé devaient se réunir à elle. Mais, tandis que les députés se rendaient à la salle, une proclamation, faite par des hérauts-d’armes et affichée par-tout, annonca que les séances étaient suspendues, et que le roi tiendrait une séance royale le 22. On donnait pour motifs de la clôture de la salle pendant trois jours, la nécessité des préparatifs intérieurs pour la décoration du trône. Cette raison puérile servit à prouver qu'on n'avait voulu que prévenir la réunion du clergé, dont la majorité avait adopté le système des communes. Cependant les députés arrivent successivement, et ils éprouvent la plus vive indignation de trouver les portes fermées et gardées par des soldats. Ils se demandent les uns aux autres quelle puissance a le droit de suspendre les délidérations des représentans de la nation. Ils parlent de s’assembler sur la place même, ou d’aller sur la terrasse de Marly offrir au roi le spectacle des députés du peuple ; de Vinviter à se réunir à. eux dans une séance vraünent royale