Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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veaux complots les occupèrent de soins plus importans, etil leur fallait encore remporter une autre victoire sur la convention, pour porter la flamme dans le Muséum, dans la Bibliothèque nationale, dans tous les dépôts des arts et des sciences. Plusieurs nouvelles classes de proscrits furent encore créées à cette époque: c'étaient les prêtres qui refusaient de se calomnier eux et la religion ; c’étaient les hommes de lettres qui osaient s'élever contre tant d’horreurs , au nom de la philosophie ; c’étaient les artistes qui quelquefois se dévouaient avec péril pour sauver des chefs-d’œuvre, objets de leur émulation. !

Le scandale semblait épuisé, l’extravagance ne l'était pas, Les mêmes hommes paraissent à la barre de la convention. L'obscénité de leur cortége s’accroissait encore d’une foule de prostituées. Chaumette s’ayance en tenant par la main une femme couverte d’un voile. La superstition qu’il attaque aujourd’hui, c’est le culte du Dieu qui est adoré sous les emblèmes de tous les cultes différens. Il vient imposer silence à la voix du genre humain, à celle de tous les sages : Mortels, s’écrie-t-il, cessez de trembler devant les foudres impuissans d'un Dieu créé par vos terreurs. Ne reconnaissez plus d'autre divitité que la Raison : je viens vous en offrir l’image la plus noble et la plus pure. S'ils vous faut des idoles, ne sacrifiez plus qu'à celle-ci. En même temps Îe prêtre de limpudence écarte le voile de la nouvelle divinité : c'était une fille de, l'Opéra, qui n’avait jamais joué avec plus mauvaise grâce, et peut-être avec plus de regret, le rôle d’une déesse. Aussitôt des chants et des danses commencèrent. La convention applaudit et consacra le culte nouveau.

Pendant plusieurs mois, et même après la chute de Chaumette et d'Hébert, la Raison recut de pareils hommages dans toutes les villes de France. Les églises, qu'on appela temples de la Raison, furent le théâtre de ces impures solennités. Les jeunes filles modestes étaient contraintes d'y figurer à côté des femmes les plus méprisables. Un plus grand outrage menaçait la beauté timide : c'était celui de représenter elle-même la déesse de la Raison. Ce rôle, brigué par l’impudence, était quelquefois imposé à la malheureuse orpheline dont les parens venaient de périr sur l’échafaud. Plusieurs des commissaires de laconvention ajoutèrent à ces fêtes odieuses les raffinemens que leur suggérait une imagination pervertie. f

Cependant les monstres qui triomphaient au milieu de ces scandales étaient près d’en porter la peine. Nous avons déjà vu par quels motifs et avec quelle ardeur Robespierre pressait leur supplice. Aux premières menaces du comité de salut