Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

NATIONALE. 169

Robespiérre l'avait fait fixer au 20 prairial, I] l'avait concertée pour en faire son triomphe. $es ennemis le lui décernèrent avec empressement. Il fut nommé président une seconde fois.

Il y eut donc une convocation de ces milliers d'hommes cruels, pour venir, à la face du ciel, reconnaître son auteur. Cette solennité ne se distinguait pas, quant à la nature du cortége, des autres fêtes populaires dont j’aieu quelquefois à faire le tableau ; mais son objet frappait vivement les esprits.

Un jour pur se lève. Un peuple immense est rassemblé au Champ-de-Mars. Toutes les autorités, c'est-à-dire les comités révolutionnaires , le tribunal révolutionnaire, s’y rendent. Une troupe de femmes, de jeunes filles, font entendre des cantiques; mais ces femmes, ces jeunes filles , ce sont celles qui, tous les jours, poursuivent de leurs cris ceux qu’on mène à l’échafaud. La convention s’avance, Robespierre est à sa tête; mais un assez long intervalle est marqué entre Jui et tout ce corps. Il porte quelques fleurs et des épis à la main. Son horrible figure s'est composé pour exprimer de la sérénité ; mais bientôt la sérénité a fui de ses traits. Il a entendu parmi les députés un d’eux qui lui a dit: Robespierre, j'aime ta fête ; mais toi, je te déteste. ( C'était Lecointre de Versailles. } Arrivé près de l'autel de la patrie, il s’adresse au peuple : il ne fait que répéter les froides déclamations de son premier discours. D'une voix plus élevée, il a prononcé ces mots : Que ce jour appartienne tout entier à la paix, au bonheur !.…. Mille cœurs tressaillent d'avance... Et demain, ajoute-t-il, demain, en reprenant nos travaux, nous frapperons avec une nouvelle ardeur sur tous les ennemis de la

patrie. Par ces seuls mots , l'inepte rhéteur a manqué le trône ; mais que de morts avant la sienne tres

Acheverai-je le tableau de cette cérémonie , aussi ridicule et atroce que son auteur? Il prend un flambeau et brûle un mannequin sur lequel était écrit athéïsme. On se retire , et des femmes furieuses vont aux portes des prisons apprendre par leurs cris aux malheureux qu'ils ont espéré en vain. Robespierre , au retour, marquait le plus grand effroi ; il croyait voir par-tout des poignards dirigés contre lui.

On eut deux jours après l'explication des mots sinistres de Robespierre. Couthon monta à la tribune, et présenta l’épouvantable décret du 22 prairial, dont nous avons donné le texte. On vit une chose nouvelle à la convention, on osa y frémir. Le silence de la mort et de la servitude y fut interrompu. Un député, nommé Ruamps, s'écria : 4S2

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