Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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raient trouvés sur le territoire français. L'horreur naturelle qui s'attache à leffusion du sang, quand le combat a cessé, porta souvent les généraux, les officiers et les soldats républicains à favoriser l'évasion des émigrés, ou bien à consentir aux subterfuges qu'ils employaient pour n'être pas reconnus. Le général Hoche avait, antant que ses rivaux de gloire, un cœur capable de cette générosité. Tallien avait à conserver un titre expiatoire auquel, de-

uis un an, il avait été fidèle, celui de l’homme du 9 thermidor. L’honneur national répugnait à répandre un sang que l'Angleterre avait livré avec tant de perfidie. Une politique prévoyante eût encore commandé de conserver pour la renaissance de la marine française un si grand nombre d'officiers distingués qui lui avaient appartenu, et que des motifs puisés dans tous les sentimens fiers pouvaient réconcilier avec leur patrie. Mais le faste, ou plutôt la faiblesse du gouvernement républicain, est de se montrer inflexible; nul ne sy croit assez de pouvoir pour exercer celui de la clémence. Ce mot ne fut pas prononcé: d’ailleurs la convention, qui croyait alors s'être trop aidée des royalistes contre les jacobins, voulait effrayer les premiers, et se ménager des moyens de leur opposer les seconds. Cinq cent soixante émigrés furent conduits au supplice ; il y en eut à peine vingt qui parvinrent à s'y soustraire par différens moyens. Le premier qui périt fut Charles de Sombreuil. Sa mort, du moins, fut adoucie par une bienfaisante illusion: il crut avoir obtenu , lorsqu'il parlementait sur le rocher de Quiberon, la vie de tous les siens, au moins celle de ses soldats. Lorsqu'il fut amené devant Tallien', celui-ci lui avait dit avec une vive émotion : 4h! monsieur, que de malheurs dans votre famille ! Charles Sombreuil écrivit, en attendant la mort, quelques lettres où il exprimait une vive confiance dans ce qu'il appelait la capitulation des émigrés. Il règne dans ccs lettres, qui furent rendues publiques, un courage qui n’exclut pas un tendre abandon : il disait adieu à sa sœur. Il ne fut pas plus heureux qu’elle dans son dévouement. L'existence de la capitulation a été démentie par l’armée républicaine , et ce qui est d’un aussi grand poids, par le général Hoche. Victor de Broglie et l’évêque de Pol périrent avec Charles Sombreuil : d’autres ecclésiastiques qui avaient suivi cet évêque eurent le même sort.

M. Pitt, en faisant dans la chambre des communes l’apologie de l'expédition de Quiberon, disait : Le sang anglais n'y a point coulé, M. Shéridan lui répliqua par ce