Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. 67

Je ne m’arrêterai. pas à décrire tout ce. que: produisaient d’embarras et de détresse pour ces nouveaux créanciers des liquidations. difficiles en elles-mêmes , et: dont un art cruel augmentaitles difficultés. La dépréciation du papier-monnaie avait réduit à une pure fiction le paiement des rentes. Le retour du numéraire irrita. plutôt qu'il ne soulagea les maux des rentiers. Le trésor public, fermé sous mille prétextes, ne laissait tomber dans les mains de quelques-uns que des sommes vainement désirées et poursuivies par une foule affamée. Alors l’oisif capitaliste, autrefois arbitre de l'élévation et de la chute de plusieurs ministres, que la révolution avait flattés de la sécurité la mieux fondée, fut écrasé: sous les roues de ce char qu'il avait vu lancer avec tant de joie. La crainte ou les horreurs déjà éprouvées de la faim causèrent parmi les malheureux rentiers plus de suicides.que n’avait fait auparavant la crainte des bourreaux, D’autres eurent recours à quelques moyens de travail et d'industrie , où leur peu d'adresse leur faisait regretter amèrement l’indolence de leurs jours heureux; d’autres, couverts par la nuit.et se cachant encore, imploraient à demivoix la pitié à. la sortie des spectacles et des fêtes, dont le délire du jour se montrait insatiable. La pitié: fut. encore plus souvent appelée et trompée par d’infâmes aventuriers qui fermèrent aux rentiers une ressource si pénible en la rendant suspecte. Le Français, le Parisien sur-tout, à qui sa mobilité fait trouver des sujets de joie et de ridicule, même à côté des sujets les plus tristes, se permit des plaisanteries cruelles sur cette détresse. On riait en regardant une caricature qui représentait un rentier exténué par la faim : on gémissait à la vue d’un de ces malheureux.

Je n’ai indiqué jusqu'à présent dans les resources du directoire que des capitaux, et pointde revenu. Laconvention avait créé les uns; c'était à lui à créer l’autre. Depuis l'assemblée constituante , le système des impôts directs avait prévalu. Il paraît qu’en cela les différentes assemblées législatives avaient moins cherché à se conformer aux principes rigoureux des économistes qu'à l'horreur que le peuple avait conservée pour la plupart des impôts indirects de l’ancien régime. Le directoire et les deux conseils prirent le parti d'essayer tous les genres de taxe qui s’accommodent avec les préjugés des pauvres, en paraissant ne frapper que sur les riches, mais qui, en accablant ceux-ci dans leur propriété, oppriment encore plus l'indigent dans son travail. La répartition de la contribution directe fixée par l’assemblée constituante , et maintenue par les deux conseils à la somme de deux cent quarante millions, retraçait les iniquités