Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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peine arrachés au sommeil , n’ont pas le temps de couper les ponts par lesquels ces îles communiquaient entre elles et avec le rivage. Bientôt Desaix se présente devant le fort de Kell, et s’en rend maître en moins de trois heures. Toute l’armée a passé sur la rive droite. On s'empare d'Ofembourg et de Rastadt. Les Autrichiens sont pousuivis jusque dans la vallée de la Kintzig. Le maréchal Wurmser parvient enfin à rallier ses troupes. Il occupe une belle position à Renchen. Le général Moreau vient lui livrer bataille, le force à la retraite, lui fait douze cents prisonniers , lui enlève dix pièces de canon, s'empare de Fribourg et de tout le Brissaw. Le général Jourdan obtient des succès non moins rapides : déjà il a passé la Lahn, le Mein ; il est entré dans Francfort. Les Francais répètent , avec une heureuse audace, ce que dans la fameuse campagne de 1704 ils firent avec tant de succès. On les avait vus alors , emportés par la victoire de Fleurus, poursuivre l'armée fugitive , sans s'inquiéter des quatre forteresses de Condé, de Valenciennes, du Quesnoi et de Landrecies, devant lesquelles ils ne laissaient que des corps d'observation. Maintenant ils se portaient sur le Danube , sans craindre des forteresses placées sur le Rhin et au-decà de ce fleuve, Manhein , Mayence, Philisbourg et Ebhrenbreiïstein. L'art de la guerre était changé, agrandi. Les places les plus fortes tombaient par des coups de canon qui se tiraient à quatre-vingts lieues de distance. Rien n'était plus souple ni plus mobile que ces grandes masses qui composaient les armées françaises : elles se divisaient suivant les grands desseins qu’elles avaient à accomplir, s’éloignaient et se rapprochaient avec une égale rapidité. Ainsi un corps de l’armée de Jourdan bloquait Mayence pendant que ce général pénétrait dans la Franconie et s’approchait de la Bohême ; les divisions de l’armée du général Moreau étaient répandues dansla Forêt-Noire, sur le lac de Constance, au pied des montagnes du Tyrol. L'avantage de sa position centrale était de former le lien de trois armées victorieuses. Par le Danube, il communiquait avec le général Jourdan, maître d’une autre partie du cours de ce fleuve. On le vit tout près de s'emparer des sources de l’Adige, pendant que Bonaparte livrait des combats si glorieux sur lAdige même.

À défaut du génie qui combine de tels plans, les généraux autrichiens veillèrent à profiter de tous les défauts d’exécution qu’ils purent y apercevoir. Ils considérèrent les montagnes du Tyrol comme une chaîne de forteresses où devait être attaché à-la-fois le salut de l'Allemagne et de l'Italie. Nous avons vu avec quelle audace et quelle activité Warmser s'y porta. L'armée autrichienne qui faisait face à Moreau,