Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

INTRODUCTION. 13

de commerce qui pouvait un jour devenir utile aux deux nations , mais dont l'Angleterre avait recueilli les fruits les plus précieux. Il avait asservi la Russie dans ses relations commerciales , et dans le même temps il avait arrêté l'ambition de Catherine IL, qui croyait s'être ouvert le chemin de-

Bysance. 19 Telle était la position de Pitt quand la révolution fran-

çaise éclata. Il parut d’abord applaudir à ses premiers mouvemens, soit qu’il respectât le généreux essor d’un peuple vers la liberté, soit qu’il se réjouit, pour les intérêts de son pays, des discordes de la nation rivale. Lorsqu'il vit l'anarchie faiblement réprimée , et qui semblait déjà envahir cette révolution, il ne s’exprima plus sur elle qu'avec un flegme dédaigneux: Les Français, disait-il, ont traversé la liberié. Rien cependant n’annongait encore en lui un ennemi déclaré de la révolution. Ce fut du milieu de l'opposition que s’élevèrent les plus furieuses imprécations contre les nouveaux principes des Français. Les deux orateurs les plus véhémens de ce parti M. Burke et M. Wyndham, firent, avec un enthousiasme presque fanatique , un appel à tous les souverains de l'Europe, et sur-tout à l'Angleterre : « Il fallait, disaientils, il fallait châtier sévérement les Français rebelles ; nulle entreprise n’était ni plus nécessaire ni plus facile. La France, disait le fougueux Burke, laisse un grand vide dans l'Europe. » On sait la réponse prophétique de Mirabeau : Ce‘vide est un volcan. Pitt, heureux dans de telles circonstances de trouver des auxiliaires dans l’opposition même, fit entrer au ministère M. Wyndham et le lord Portland. Il préparait la guerre et l'armement général de l'Europe. C'était sous son influence secrète que s'étaient formées les conférences de la Haye et de Pilnitz. S'il différa à faire déclarer l'Angleterre , c’est qu’il trouvait quelques difficultés à rendre la guerre nationale. Le supplice de Louis XVI lui en fournit l’occasion. Il déplora cet événement avec une sensibilité qui n’était point le caractère accoutumé de son éloquence. IL fit pressentir une guerre dont la magnanimité dirigerait tous les mouvemens ; il ne songeait qu'à une guerre d’avarice. Celle-là seule pouvait être long-temps nationale; car la nation anglaise est généreuse par accès et avide par instinct. Pitt devint, pour le malheur de la coalition, le maître de tous les cabinets de l’Europe. Il ÿ avait un genre de talent qui manquait à son génie, et dont sa position d’ailleurs lui permettait peu l'usage; c'était celui de diriger des plans de campagne. L'Angleterre eût eu besoin, dans de telles