Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

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direction, à tout contrôle, qu'il est trop libre en un mot et qu'il doit se plier au joug de la coterie anglaise. Ils ont convaincu le roi de la nécessité de l’obliger à suivre la route qu’ils suivent euxmêmes et à marcher non selon son inspiration, mais selon les leurs.

La prétention est singulière, d'autant plus déplacée que le comte d'Artois, sourd aux appels incessants de Charette, se dérobe à toutes les occasions qui s’offrent à lui de l’aller rejoindre. Avec un peu d’audace, cependant, il pourrait passer en France. Il le pourrait par la côte de Saint-Jean-du-Mont, par la pointe de Locmariaquer, puisque c’est par ces voies que les émissaires chouans viennent conférer avec lui. Mais il tient pour indigne de son rang d’aller chouanner. Sa conduite, si peu conforme à ses paroles, est si piteuse, qu’au jour de la défaite finale des chouans elle donne une apparence de raison à la fameuse lettre, faussement, d'ailleurs, attribuée à Charette et adressée à Louis X VIIT, qui commence par ces mots : « Sire, la lâcheté de votre frère à tout perdu ».

Le document était apocryphe; cette lettre, qu'on se passait sous le manteau, était l’œuvre d’un