Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

LES ÉMIGRÉS ET LES GÉNÉRAUX DE NAPOLÉON. 255

par Posen, espérant y arriver avant les troupes de Napoléon. Malheureusement, elles y arrivèrent presque en même temps que lui et il se trouva dans l'impossibilité de poursuivre son voyage ni de revenir sur ses pas. En ces circonstances critiques, que sa qualité d'émigré rendait si périlleuse pour lui, il se décida à demander une audience au maréchal Davout, dont le quartier général était à Posen. Sur le vu de son nom, Davout la lui accorda aussitôt et le reçut avec tant de bienveillance qu'il n’hésita pas à solliciter un passeport pour Hambourg.

« Pourquoi ne restez-vous pas ici? lui demanda le maréchal; vous n’avez rien à craindre.

— Etje ne crains rien, s’écria fièrement l'émigré. La crainte n’a jamais approché de mon cœur. Si je veux m'éloigner, c’est que, n’ayant pour vivre qu’une pension que me fait l’Angleterre et ne pouvant la toucher si je restais parmi les Français, je me verrais sans ressources.

— Être pensionnaire anglais n'est pas une recommandation auprès de nous, objecta Davout.

— Je suis toujours étonné, avoua l’émigré, de devoir mon existence à une nation que, depuis des siècles que la monarchie existe, mes pères ont

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