Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

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cravale verte ne pouvaient manquer de donner lieu à quelques rixes avec les révolutionnaires, qui voyaient, dans leurs manières et leur ton, les premiers symptômes d'une réaction pareille à celle de Lyon. Coque, Mourier, Thil et plusieurs autres marseillais ou grillards se rendirent un soir au café Galline où se réunissaient les muscadins. La querelle ne tarda pas à s'engager entre le jeune Sautter et les révolutionnaires; des mots on en vint aux coups, el Sautter, qui était armé d’un poignard, et qui n’était pas assez fort pour lutter contre ses anlagonistes, se servit de son arme avec une telle habileté, qu'ayant renversé Thil et Coquet, il eut tout le temps de s'enfuir et de se cacher. Thil était légèrement blessé à la cuisse, mais Coquet était frappé mortellement.

La nouvelle de ce meurtre, répandue incontinent dans la ville, y excita un grand mouvement. C'était le 23 Mai, à huit heures et demie du soir; les révolutionnaires coururent aux armes ; mais les Syndics, prévoyant les excès auxquels ils pourraient se livrer s'ils eussent été seuls à s’armer, firent immédiatement battre la générale. Pendant que presque tous les citoyens se rendaient à l'Hôtelde-Ville ou à leurs quartiers respectifs, les Grillards et les Marseillais restaient réunis; une partie s’empara du parc d'artillerie, et l’autre se promenait en colonne serrée, d’un air menaçant, par toute la ville. Leur intention était d'épurer les postes, c'est-à-dire d'en chasser les aristocrates et les englués, vrais ou prétendus, peut-èlre de les mettre en état d’arrestation. La plupart des postes firent assez bonne contenance : l'imprimeur Sestié commandait celui de la Treille, vers lequel s’avancèrent d'abord les insurgés ; il refusa avec fermeté l’épuration qu'on lui de-