Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise
SF O9E
peuplée par sa solitude même qui en faisait le séjour du recueillement et de la méditation. Ami passionné de la simplicité, ce fut avec un vif sentiment de plaisir, je dirai presque d’orgueil, que j’admirai celle dont ici tout portait l’empreinte, et qui concordait si bien avec mes notions sur le vrai beau, sur le grandiose et les moyens de produire des sensations profondes, d'obtenir ces effets puissants, prompts et pittoresques, auxquels ne sauraient atteindre, dans aucun genre, la complication des formes, la multiplicité des ornements et limitation servile de ce que la mode a consacré.
ÇAu fond de la salle, une estrade élevée de plusieurs marches portait un sopha de style antique, parsemé d’hiéroglyphes et sur lequel reposait un objet enveloppé d’un grand chàle de cachemire.
« Mes conductrices s’avancèrent à pas lents et silencieux et s’arrêlèrent au bord de l’estrade. Je les suivis, el, comprenant leur intention, je montai jusqu’au pied du sopha, sur le dossier duquel je m’appuyai. Bientôt, je vis s’agiler, s’entr'ouvrir la partie supérieure du voile, et paraitre la tête d’une jeune fille dont je ne profanerai pas les traits en essayant de les décrire. Eh! quel pinceau ne désespérerait d'y réussir, d'en reproduire l’harmonie et la délicatesse, d'exprimer ce mélange ineffable de grâce, d’innocence et de honté, cette päleur attendrissante, ce charme de vie et de jeunesse que n'avaient pu flétrir les souffrances, les chagrins, le souffle menaçant de la mort ?
€— « Cest vous, me dit péniblement la figure angé« lique aux yeux bleus, siéges de la candeur et de la « résignation; c’est vous; je vous atlendais, écoutez. « écoutez la romance de Rosa mourante, et. ne l’oubliez € pas », ajouta-t-elle d’un ton plus accentué.
€ À ces mots parut au-dessus de la tête de Rosa un