Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LA RENAISSANCE INTELLECTUELLE DE LA NATION SERBE 103

rang de général. Après le premier partage de la Pologne, elle lui avait donné un domaine considérable, celui de Schklov, dans le gouvernement actuel de Mogiley (ou Mohilev). Dans ce domaine, Zoritch menait une vie princière, entouré d’une cour nombreuse. Il entretenait un théâtre où l'on jouait l’opéra français et le ballet italien. Il avait fondé une école militaire, où deux cents jeunes gens étaient élevés à ses frais. Il avait déjà appelé auprès de lui un autre Serbe, Emmanuel lankovitch.

Pour fixer auprès de lui Obradovitch, le général lui promettait de fonder à Schklovy une imprimerie serbe, où il pourrait imprimer ses ouvrages. À la fin de l’année 1787, le moine errant se rendit à l’appel de son compatriote. Mais Loritch — auquel l’argent faisait souvent défaut — ne tint pas sa promesse, et il le quitta pour se rendre en Allemagne, par Kœnigsberg et Berlin. Au courant de l’année 1788, nous le retrouvons à Leipzig, où il fait imprimer un recueil de fables, traduites de diverses langues, et une ode sur la prise de Belgrade, enlevée par Loudon aux Turcs (1789)'.

Le dernier chapitre des Mémoires d'Obradovitch est daté de Leipzig, 1° janvier 1789. Mais il devait survivre encore de longues années et nous pouvons restituer aisément le reste de sa carrière. Nous savons qu’il vécut à Vienne, comme professeur libre, de 1789 à 1802. L'argent qu'il gagnait à donner des leçons, il le gaspillait à imprimer des livres qui ne se vendaient guère : Recueil de choses édifiantes (Vienne, 1793), /nterprétation des Évangiles des Dimanches (Venise, 1803).

En 1802, il se transporta à Trieste. Dans cette ville existait une colonie de riches négociants serbes qui s’offraient à lui constituer une pension à condition d'écrire des livres pour l'éducation du peuple serbe.

En 1804 éclata, chez les Serbes de Turquie, l’insurrection dont Karageorges était le chef. Obradovitch n’y prit pas une part directe. Sa robe et son âge ne lui permettaient

1. Belgrade devait être reprise par les Turcs deux ans après.