Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LA BULGARIE MODERNE 199

lités de son esprit et cette espèce de fascination qu’il exerce sur son entourage. Ils aiment à le comparer à son oncle, le duc d’Aumale, auquel les événements n’ont malheureusement pas permis de mettre à profit tous les mérites dont la nature l’avait doué.

Ferdinand est monté sur le trône dans des circonstances délicates; non seulement il a très habilement louvoyé au milieu des partis qui se disputent le pouvoir avec âpreté et qui souvent ne reculent pas devant les moyens les plus extrèmes pour satisfaire leurs rancunes ou leurs ambitions (assassinat de l’ex-ministre Stamboulov (1895), assassinat de Karavelov (1903), assassinat de Petkov (1907)), mais, tout en surveillant la politique intérieure, il sut tenir tête aux défiances de ses voisins, Serbes, Grecs ou Turcs, et saisir très opportunément l’instant où la puissance suzeraine serait paralysée par les ambitions autrichiennes pour proclamer cette indépendance à laquelle la Bulgarie n’aurait jamais osé songer au moment où il est monté sur le trône.

Les querelles des partis, la répartition des portefeuilles entre leurs représentants, au fond tout cela intéresse bien peu l’Europe et la postérité ne s’en souciera guère. Ce qui l’intéressera, ce qui nous intéresse avant tout, c’estle progrès économique du royaume, c’est le progrès moral de la nation

bulgare. IV

À l’occasion du vingtième anniversaire de l'avènement du souverain, ses ministres ont eu l’idée de lui adresser une série de rapports dont l’ensemble constitue ce que l’on pourrait appeler le bilan de son règne.

Ces rapports, rédigés en langue bulgare, forment un volume grand in-octavo de plus de six cents pages ; ils attestent le labeur infatigable auquel ce petit peuple a dû les succès qui n’ont pu étonner que ceux qui ne le connaissent pas. Assurément, les Bulgares ont encore beaucoup à faire pour atteindre à tous les raflinements de la civilisation occiden-