Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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reur et la Porte. Elle a été en 1848 le foyer le plus actif de la résistance de la nation serbe contre les Magyars.

Le père du futur historien était un simple marchand de bestiaux. Il envoya son fils fort jeune à l’école. L’enfant ft de si rapide progrès que lorsqu'il fut arrivé à sa onzième année son maître le pris comme adjoint. Tout en aidant à instruire ses jeunes camarades Jovan fréquentait l’école latine slave, où l’enseignement se donnait soit en latin, soit d’après des manuels russes dont la langue, très voisine du slavon d'église’, était aisément comprise des jeunes Serbes. À l’âge de dix-huit ans Raïtch quitta Karlovtsi pour aller se perfectionner d’abord chez les Jésuites de Komorn, où il passa quatre années, ensuite à l’école protestante de Soprony (Pressbourg). Mais la Russie l’attirait. Faute de ressources pour payer les frais d’un long voyage, il fit le trajet à pied. En 1753 il arriva à Kiev, il y resta trois ans occupé à étudier la théologie orthodoxe, poussa jusqu'à Moscou et à Smolensk. Rentré dans sa ville natale, où il rapportait une foule de manuscrits, il sollicita une place au séminaire. Mais sa candidature fut écartée par des moines jaloux de son savoir. Il retourna à Kiev d'oùil gagna la Moldavie, Constantinople et la péninsule du Mont-Athos, où il résida deux mois au monastère serbe de Kilandar. En voyageant ainsi ce clericus vagans w'a pas seulement pour objet de voir du pays, il se propose surtout de réunir des documents historiques pour ses travaux futurs. A Khilandar il trouva des coffres pleins de vieux manuscrits. Mais les moines, aussi bornés qu'ignorants, ne lui permirent pas de les examiner et il ne put que copier en cachette quelques documents. Dans ce monastère célèbre il se rencontra avec Paisii*, qui devait être le père de lhistoriographie bulgare de même que Raïtch est le père de l’historiographie serbe.

1. Le slavon d'église russe a subi une forte influence de la langue russe vulgaire qui diffère beaucoup du serbe proprement dit. 2. Sur Paisii, voir plus loin l’étude qui lui est consacrée.