Souvenirs de Russie 1783-1798 : extraits de journal de Mme Leinhardt

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chauve-souris, ainsi que sa dame de compagnie, la comtesse Branitzka. M'eT.. reconnut l'Impératrice à ceci qu'en passant elle imila le cri du chat, « ce qu’elle fait à merveille ».

L'année suivante, le 26 février 1785, l'Impératrice est en domino de satin blanc. « Elle jouait au whist avec le prince Potemkin, le crand chambellan Schouwalof et le comte Lobenzell. Ces messieurs ne disaient presque rien, à l’exception du prince qui, de temps en temps, plaçait un mot. Mais la grande dame parlait sans cesse. Elle regardait tout autour d'elle en jouant. Ses veux sont d'une heauté singulière : son regard est fier, expressif et tendre ; son sourire est charmant : elle a de très belles dents. Les chambellans et les gentilshommes de service engageaient les spectateurs à ne pas se Jeter sur elle. Elle secouait la tête en les regardant comme pour dire : Laissez-les ; ils ne m'incommodent pas. Les jeunes grandsducs (Alexandre et Constantin vinrent baiser la main de leur grand maman avant de se retirer. Ils sont charmants tous les deux et très avancés pour leur âge. [Le 24 décembre précédent, Alexandre avait fêté son septième anniversaire. À cette occasion, l’Impératrice lui avait fait don d’une épée enrichie de brillants.] Après le jeu, l’Impératrice se retira tout de suite. Quelquefois, elle revient masquée, mais alors personne ne la reconnait. »

Le 12 janvier 1786, Mie L. assista en spectatrice au bal de la Cour. « L'impératrice ne s'adresse qu’à des femmes de généraux en chef ou de ministres étrangers. Puis, elle s’avance du côté des hommes, dit un mot à chacun sans faire le tour et se retire tout à coup par une porte de côté. »

Les bals étaient fréquents à l'Hermitage. Au souper qui suivait, l’Impératrice, pour témoigner sa faveur aux personnes qu'elle distinguait, leur envoyait plusieurs de ses plats particuliers. Elle paraissait même, avec sa petite société, à des bals masqués publics. Sans garder l'incognito, elle s’y rendait dans des carrosses ordinaires. Elle était accompagnée de Leurs Altesses Impériales et des jeunes grands-ducs. À la porte elle se trahissait en donnant 500 roubles pour des verres de limonade.

Le 12 janvier 1784, jour de l'an russe, M1 L. raconte que le jour de Noël et le jour des Rois, on joue aux petits jeux à la Cour. « La grande dame, dit-elle, s'en mêle, et tous ceux qui peuvent l’attraper lui baisent les mains. C'est en cela que consiste son rôle