Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France
ne
Après des marches forcées, de dix à quinze lieues par jour, nous atteignîimes Salamanque, où nous n’eûmes presque pas le temps de voir la ville, qui possède quelques curiosités, que nous aurions été bien aises de visiter. Jusqu'à Salamanque, nous avions perdu quelques traînards. Avec les marches forcées, il est difficile qu'il en soit autrement. L'armée française, qui nous devançait de quelques étapes, tenait à arriver à Lisbonne avant le départ du roi. De Salamanque, les routes devinrent à peu près impraticables. Un jour, avant de pénétrer sur le sol portugais, nous avions à traverser une forêt étendue, presque impénétrable, et tellement abimée par des torrents et des ravins profonds, que la moitié de nos hommes s’y égarèrent. C'était un dédale affreux, au milieu duquel nous ne pouvions ni nous reconnaître ni nous diriger. Les torrents avaient été grossis par des pluies diluviennes, qui n'avaient cessé de tomber pendant plus de huit jours; aucun pont, aucune route tracée. Nos hommes étaient obligés de traverser ces torrents bourbeux, ayant de l’eau jusqu’à la ceinture. Ajoutez à cette misérable situation peu de vivres, des rations à peine suffisantes pour nous soutenir. Cette forêt présentait encore un