Sur un portrait inédit de Naundorff : (1832)

6 SUR UN PORTRAIT INÉDIT DE NAUNDORFF

avant le 28 août !. S’il fallait en croire ce « menteur impudent » et concilier ses différents textes, il aurait eu le temps, dans ces quatre ou cinq semaines, de faire le trajet Grossen-Dresde-ParisNantes-Paris-Genève. C’est, en effet, cet itinéraire qu’il se fixe rétrospectivement dans une lettre de 1833 à l'empereur d'Autriche (dossier Albouys, t. I, p. 131), où il prétend qu'il est allé avertir la duchesse de Berry des dangers qui la menaçaient.. Car, une fois pour toutes, il est bon de savoir que, selon Naundorf, c’est Naundort seul qui faisait tout en Europe : c’est lui, par exemple, qui avait donné à Charles X l’ordre de quitter l'Angleterre.

Seulement, on lui avait joué le tour pendable de faire passer le même Charles X à Francfort, au moment précis où son infortuné neveu ne résidail plus à Crossen. C'était à n’y rien comprendre! Naundorff tenait les rênes de tous les empires : on le dupait pourtant.

Il allait se venger en faisant tenir à « l’oncle » détrôné une preuve décisive : son portrait.

* * *#

Tel est l’homme, dans les derniers mois de 1832 : il est volontairement fou, il s’autosuggestionne pour escroquer en sûreté de conscience, il se façonne, se retouche, s'exerce au style de la diplomatie et des proclamations, prend des attitudes sibyllines et napoléoniennes, empile avec audace des mensonges incohérents, accuse, commande, flatte, injurie, étonne par sa ténacité d’aigrefin impérieux, par son lâchez-tout de casse-cou qui n’a rien à perdre et par son toupet colossal.

Au physique, ce qu'on Sait de plus net ou de plus caractéristique, — et par lui-même, — c’est qu'il a les cheveux bruns tirant sur le noir, drus et frisottés, presque crépus. Or, de semblables cheveux en tire-bouchons, on les a depuis sa naissance ou on ne les a jamais. C’était donc une maladresse suprême pour Naundorff de s’attribuer cette nature de cheveux et de les qualifier, dans le plus lointain passé, de noirs, ceux du jeune dauphin ayant été caractérisés par leur teinte blonde et leurs ondulations lentes. Mais la maladresse était commise. Lorsque, le 9 mai 1831, le conseiller du tribunal supérieur de l'arrondissement, Hirschfeld, avait fait sommation à l'horloger de Crossen, repris le justice, de comparaître le jouf même devant le tribunal pour s'expliquer sur ses prétentions au nom qu'il réclamait, le pseudo-

4 « Je partis dans les derniers jours de juillet 1832 », a-t-il écrit luinême à François Ier, empereur d'Autriche, — Il aurait pu, d’ailleurs, _parler à S. M. des inquiétudes que lui donnait la police prussienne. Elles ne furent pas étrangères à son exode : on commençait, en effet, à le trouver encombrant,