Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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courrier de ton amant que je te présente. »

Sophie Arnould! c'est un bon mot qui nous amène à parler d'elle; et aussi bien ne représente-t-elle pas tout l'esprit léger, sautillant, sceptique du xvin° siècle? Au moment où paraissait le Vol plus haut, c'est-à-dire en 1784, la célèbre actrice avait la quarantaine et ses débuts remontaient à l'an de grâce 1757. Sa carrière se terminait presque au moment où Saint-Huberty débutait !, Mais quelle longue suite de triomphes, depuis son rôle dans l'opéra

1, C’est en juillet 1775 que Sophie Arnould cessa de faire un service régulier à l'Opéra. Les directeurs lui offrirent de la payer au cachet, à tant par représentation. Après avoir menacé de se retirer définitivement, Sophie accepta l’arrangement, au mois de novembre de la même année. On lui accorda 100 francs par représentation, ce qui fut considéré comme énorme et provoqua la jalousie de, Rosalie Levasseur et de Mie Châteauvieux. C'est à ces démélés qu'il faut attribuer la cause de la grande brouille de Sophie et de Rosalie, qui avait repris le rôle de sa camarade dans l’Alceste de Gluck. Sophie joua encore dans plusieurs opéras : Euthyme et Lyris de Deformeri, et dans Iphigénie, mais sans grand succès. Dans Adèle de Ponthieu, dès octobre 1775, on l’avait trouvée « vieille et sans voix » (Mémoires secrets, 23 octobre). Cependant son jeu était toujours aussi noble. La reine l'applaudit fort dans Iphigénie (23 février 1777); mais le public sifflait toujours. En août 1778, elle fut huée dans la représentation en l’honneur du duc de Chartres. Il fallait céder la place aux jeunes.