Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

MORANDE POLICIER. 61

Mahon, Morande, écrivaient tous dansle Courrier. Ils se réunissaient d'ordinaire chez le libraire Boissière, Genevois d’origine, le véritable créateur de cette fabrique de libelles qui, de Londres, inondait l'Europe de ses produits et faisait trembler les souverains. Ce Boissière, par ses antécédents et sa vie accidentée, avait tous les titres nécessaires pour diriger une vaste entreprise de chantage. Laquais pendant sept ou huit ans du Polonais Matousky, l’escroc distingué, il avait volé à son maître une somme considérable pour ne pas démentir le proverbe : A voleur voleur et demi, et on l’eût pendu dans la bonne ville de Lubeck si les preuves du vol n'avaient pas semblé insuffisantes. Instruit par cette aventure, Boissière était venu s'installer à Londres, tout en conservant des correspondances avec les libraires allemands et hollandais, notamment avec Gosse fils, de la Haye, et il consacrait ses aptitudes spéciales à monopoliser le commerce des libelles anonymes et desouvrages obscènes. Spéculateur équivoque et louche, peu lui importaient les moyens, pourvu que l’argent vint à sa caisse. Afin de prendre toutes ses sûretés, il intéressait dans ses audacieuses opérations plusieurs agents de la police francaise à Londres, tels que Boucharderie, de son vrai nom Belson, qui révéla au gouvernement

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