Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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Depuis le jour où Marie-Antoinette, la fille de l’empereur d'Allemagne François I‘ et de l'impératrice-reine Marie-Thérèse, était venue en France en 1770, à l’âge de quatorze ans et demi, pour épouser le dauphin qui fut Louis XVI, elle s'était trouvée en butte aux calomnies, à la haine sourde de la cabale des dévots, qui regardait « l'Autrichienne » comme la protégée et la complice de Choiïseul. On eût dit, en vérité, à voir l’acharnement des filles de Louis XV contre la dauphine, que c'était elle qui avait aboli la Société de Jésus. Madame Adélaïde notamment se signalait par l'amertume de son langage et encourageait sous main la diffamation. D’autre part, la coterie des Du Barry, appréhendant l'influence que pouvait prendre à lacour lajeune etcharmante princesse, unissait ses rancunes aux saintes colères de la Vauguyon‘ et de ses pareils. L'impopularité

r. Lorsque le duc de la Vauguyon mourut, en 1772, Grimm (t. VII, p. 435) ne lui ménagea pasles sarcasmes. Il sé moque surtout du billet de mort, qui contenait une énumération interminable de titres baroques, celui de juveigneur des comtes de Perhoët, par exemple. Or la malicé publique prétendait que le noble duc descendait tout simplement d’un chirurgien, dontle fils, au temps de la minorité de Louis XIV, aurait eu ladresse de se faire épouser par l’héritière de la maison de Saint-Mégrin.