Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

MORANDE PEINTRE DE MŒURS. ot

plus en vue. La conséquence de l’évolution du Gazetier cuirassé fut de donner un autre cours à sa verve et de la diriger sur des sujets beaucoup plus propres à plaire aux libertins qu'aux révolutionnaires et aux ennemis de la monarchie. Si le xvm® siècle a été une époque de fièvre philosophique et politique, c'était aussi le siècle de la débauche élégante et des mœurs faciles. À la veille du grand cataclysme, du déluge, comme disait Louis XV, il semble qu'on se hâte de savourer et d'épuiser tous les plaisirs, d’aller jusqu'aux limites extrêmes du dévergondage physique et moral, d’user jusqu’à ja dernière heure de tous les privilèges de la fortune et de la naissance; et chacun marche vers l'abime, le front couronné de fleurs. Le pinceau de Morande rend avec une fidélité rare l'aspect brillant de cette société que la destinée condamne à une dissolution prochaine et irrémédiable, mais qui cache ses germes de mort sous un éblouissant vernis de grâce et d'élégance. Ah! c'est un guide plein d'expérience que l’ancien pamphlétaire. Il connaît tous les vices, pour Les avoir indistinctement pratiqués; ces grands seigneurs, il les juge avec d'autant plus de vérité qu’il les a observés non pas dans leurs salons, et dans leurs costumes d’apparat, mais dans les plus mauvais lieux et dans le