Trois amies de Chateaubriand
‘214 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND
Où vous manquez, tout manque... Vous ne m'écrire” pas. Moi, je vous écrirai, quoique pouvant à peu former uné lettre. Le vieux chat ne peut plus jete: sa griffe qui se retire. Je rentre en moi. Mon écriture diminue, mes idées s éffacent; il ne m'en reste plus qu'une : c'est vous. »
Suivons-le d’année en année. C’est le déclin majestueux et pathétique du soleil, après un jour mêlé dé rayons et d’orages.
En 1841, comme Ampère allaït en Grèce, Chateaubriand lui écrivit : « Faites bien mes adieux au mont Hymette, où j'ai laissé des abeilles; au cap Sunium, où j'ai entendu des grillons; et au Pirée, où la vague venait mourir à mes pieds dans le tombeau de Thé: mistocle.. Il me faudra bientôt renoncer à tout. J'erre encore dans. ma mémoire, au milieu de mes souvenirs; mais ils s’effaceront.. Vous n'aurez retrouvé ni une feuille des oliviers ni un grain des raisins que jai vus dans P Attique. Je regrette jusqu’à Pherbe de mon temps. Je n'ai pas eu la force de faire vivre une bruyère... »
Je n'ai pas eu la force de faire vivre une bruyère, — je ne sais pas s’il ÿ a, dans toutes les littératures, une telle phrase de détresse ; je ne sais pas s’il y a une telle phrase de désespoir définitif, dans les prophètes de Jérusalem qui ont le plus terriblement dénoncé l'inutilité de vivre et d'agir. Et voilà le chaorin dernier de l'homme qui peut-être a le plus
4. Enmonp Binf, Les dernières Années de Chateaubriana, p. 301. Lettre du 19 juillet 1840: