Trois amies de Chateaubriand
258 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND
c'était un de ses plaisirs que cette jeune femme lui lût des pages qu’il avait écrites; —il lui disait qu’il aimait sa voix. Et il aimait aussi les phrases qu’il avait écrites. Le martyre d’Eudore le faisait pleurer... Et, comme ils avaient l’un et l’autre le goût des larmes romantiques, Hortense continuait de lire., Alors René sanglotait; et, quand Eudore offre son sacrifice pour le salut de sa mère, punie d’avoir aimé ses enfants avec trop de faiblesse, René pensait mourir, Quand il revenait à lui, Hortense lui plaisait plus que jamais. Il lui disait qu’elle était belle; il lui disait qu’il n’avait rien vu de pareil; et puis il ne lui disait plus rien.
C’est ainsi que Les Martyrs, qui sont un livre de poésie religieuse, aiguisaient la tendresse de ces amoureux et remplaçaient, — quelle aventure! le Lancelot, tendre et insidieux, qui mit aux bras Fun de l’autre, jadis, Paolo et Francesca.
Telles furent les promenades et les entretiens d’Hortense Allart, jeune et un peu folle, et de René de Chateaubriand, vieux et très fol.
Et puis, mon Dieu, qu’arriva-t-il?... Doit-on penser que les potins prirent plus d’acuité, avivèrent leur menace méchante? Plutôt, imaginons que Chateaubriand, qui n'avait pas le cœur fidèle, fut un peu las d’Hortense. Ah! aussi bien, c'est la faute d'Hortense : Hortense était beaucoup trop gentille, Hortense se donnait avec profusion, ce n’est pas ainsi qu'on garde longtemps un tel infidèle!
Toujours est-il que René conseilla, un jour, à