Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
PREMIÈRES ANNÉES (1753-1778). 17
rattacher à aucune des familles homonymes dé la sienne, originaires du Forez, du Rouergue ou d’ailleurs. Depuis, dans l’émigration, ses ennemis lui ont contesté son titre et jusqu’à son nom. C'était faire acte de mauvaise foi ou’d’ignorance. Ce qui demeure exact, c'est que, ses parchemins n'ayant pas été reconnus d'une antiquité suffisante, il ne fut point admis à monter dans les carrosses du roi, et, par dépit autant que par goût, il se fit citoyen de la grande république des lettres, alors toute-puissante. Sa vie jusqu’en 1789 se passa en études, en voyages et en plaisirs. En 1775, on le trouve en Suisse, où il venait consulter sur sa santé Tissot, le célèbre médecin de Lausanne. Au retour de ce voyage, il recut trois mois à Ferney l'hospitalité de Voltaire, et rapporta de cette visite une belle édition illustrée de la Pucelle, cadeau du patriarche; mais son admiration et ses soins allèrent plus: volontiers à Jean-Jacques Rousseau.
Il s'était lié avec l'auteur du Contrat social, probablement à Bourgoin et dans la région du Lyonnais, chez le marquis de la Tourette, leur ami commun, ou chez Anglanier de Saint-Germain, le pieux catholique qui eut le privilège de ne jamais porter ombrage au philosophe: genevois. Leurs relations, bien qu'étroites, passèrent inapercues pour les contemporains, car d’Antraigues à été le seul à nous les faire connaître (1). Il s’est dit le: dernier ami, le dernier disciple de Jean-Jacques, et il l'a été en effet, de 1771 à 1778. Il reçut de lui à ce titre un grand nombre de lettres, aujourd'hui perdues, et re-.
(1) Musset-Pathay, qui a dressé dans son Histoire de la vie et des œuvres de J.-J. Rousseau une longue liste des personnes. ayant été en relations suivies ou même passagères avec Rousseau, ne nomme pas d'Antraigues.