Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
VOYAGE EN ORIENT (1778-1779). 27
Égyptienne écrasant sous ses pieds l'enfant dont on vient de lui enlever la subsistance, et précipitée de ce fait dans le Nil par ceux mêmes qui l'ont dépouillée. « Quel homme, s'écrie-t-il, peut n'être pas athée devant un tel spectacle? »
D'Antraigues était alors, ne l'oublions pas, le plus fervent des libres penseurs. Il méprisait les chrétiens comme les Tures, et parmi les chrétiens les Latins autant que les Grecs. Hostile non seulement aux couvents, mais à toute religion révélée, il estimait le Koran bien plus favorable que l'Évangile à l'épanouissement des facultés et des passions humaines. Il ne se souvint jamais de sa religion au milieu des Infidèles que pour remarquer combien elle valait d'avanies à ceux qui la professaient. Lui-même se considérait sérieusement comme bumilié lorsqu'on l'obligeait, devant l'autel de quelque monastère, à se prosterner devant des reliques. Il n’estime saint Antoine qu'à cause de la Tentation de Callot, et quant aux moines contemporains, il les salue de cette boutade : « Si Dieu aime les estomacs à jeun et les cris discordants, il doit être satisfait. » Au couvent de SaintMacaire, il a trouvé, il lui faut l'avouer, l'hospitalité la plus touchante, la plus empressée; mais ces soins l’étonnent, l'obligation qu'il en doit avoir lui pèse, et il Jui semble que sa gratitude sera moins lourde s’il l’accompagne de sa pitié. |
Heureux, du moins, quand il rencontre sous le turban un sceptique irrévérencieux à sa manière ! En allant du Caire à l’ancienne Héliopolis, il a fait route avec un musulman esprit fort qui vient de consommer, à la Mecque même, toute une caisse de liqueurs fortes; provoqué par lui sur la question religieuse : « Je n'en parle jamais >, a-t-il d’abord répondu. Ce qui lui à