Un hiver à Paris sous le Consulat (1802-1803) d'après les lettres de J.-F. Reichardt
SOUS LE CONSULAT. à
David, qui en ont le plus grand nombre, les admettent tous les jours moyennant une rétribution d’un demi-louis par mois; l'élève est assuré d’un contrôle rapide, mais quotidien, du maître. Trente sculpteurs, dont treize professeurs; dix architectes; vingt et un graveurs sur cuivre, dont six ayant des élèves, figurent au catalogue. Les efforts de ces artistes pour rompre avec la routine et revenir à la nature sont dignes d’éloges. On étudie sérieusement l'antique, et, bien qu'il soit facile de discerner dans les meilleures œuvres certaines parties évidemment copiées sur le marbre ou sur le plâtre, cette constatation est moins déplaisante pour un ami de l’art que les indices de l’usage abusif du mannequin ou du modèle — quelque comédien réformé, — si choquants dans la plupart des tableaux de l’époque antérieure. N'ayant pas l’intention de faire concurrence aux critiques d'art, je reviens à la chronique mondaine. C'est une autre façon d'étudier Paris, tel que je le retrouve après dix ans.
Avant-hier, répondant à une invitation du marquis de Lucchesini (1), notre envoyé, j'ai assisté à l'une de ses réceptions du samedi, qui attirent le monde élégant, parisien et étranger. Le corps diplomatique au complet, des représentants de l’ancienne et de la nouvelle société,
(4) Lucchesini, chambellan, et Reichardt, maître de chapelle de Frédéric II, étaient d'anciennes connaissances. Ils avaient même été associés pour composer le chant funèbre exécuté aux obsèques solennelles du Roi, le 5 septembre 1786.
Le Florentin Lucchesini était un homme d'esprit; mais il avait eu une idée bizarre, en haranguant le premier magistrat de la République française en langue italienne, à l'audience où il remit sa lettre de créance. Bonaparte, qui détestait qu'on lui parlât italien en public, garda une impression mauvaise : Lucchesini resta pour lui un finasseur. (Mme p’ABRANTÈS, Mémoires, À. IL.)