Un missionaire de 93 : Marc-Antoine Baudot : son róle politique, ses missions, ses mémoires ou notes historiques

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à l'indépendance de son caractère : on chercherait en vain, dans son œuvre, un mot de flatterie à l'adresse des masses, au bonheur desquelles il a consacré la meilleure partie de sa vie; sa philosophie procède du spiritualisme, säns qu'il se laisse toutefois, absorber par cette doctrine; il n’est, à coup sûr, ni matérialiste, ni athée; comme la plupart des Conventionnels, il est déiste ; il croit à la nécessité d’une religion, et semble attiré vers le protestantisme, dont les dogmes lui paraissent moins incompatibles avec la raison que ceux du catholicisme romain. Cependant il rêve un culte plus simple encore, et plus épuré (ce qui n’est guère possible) que celui de Luther et de Calvin, culte vraiment philosophique, dont le cœur de l'homme eût été le temple inviolable, mais que sa nature immatérielle eût mis hors de la portée des masses. Baudot se trompait, en effet : les abstractions sont du domaine exclusif de la pensée, et ne peuvent être comprises que par l'élite ; les masses ne s'intéressent qu'aux objets qui frappent les sens : de là, si l’or admet la nécessité d’une religion, la nécessité corrélative d’un culte public, qui s'adressera aux yeux de la foule, pour pénétrer jusqu’à son âme, car, jamais cette âme ne pourra, sans aide, s'élever assez haut pour entrer en communion avec le grand Être, et il faudra toujours que des sym boles viennent lui représenter, sous une forme visible et tangible, l’idée religieuse, insaisissable pour ses facultés mal affinées. L'erreur de Baudot est respectable, car elle repose sur l'opinion trop avantageuse