Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

NECKER, MIRABEAU, SÉNAC DE MEILHAN 241

d’un objet qui lui tient à cœur, elle contrôle l'avis de son «factotum », et donne le sien en connaissance de cause.

Elle s'occupera de Mme d’Epinay, mais il importe de laisser Necker à ses travaux et à ses plans d'économie. « Laissez faire M. Necker, écrit-elle ; je pense que le temps viendra qu’il pensera à ses amis ; à présent il pense à la France. » ({) Elle sait combien difficile il est, quand onest au pouvoir, de résister à l'assaut des amis; aussi, loin de reprocher à Necker « le tic de préférer ses ennemis à‘ses amis, » elle lui trouve un grand courage qui dénote une âme forte : « C'était mettre un frein aux prétentions et montrer le comble du désintéressement Tout cela sont de forts symplômes d'âme forte et inébranlable et de toutes les qualités qui la constituent. » En écrivant ces lignes, Catherine songeait peutêtre combien est heureux l’homme d'Etat qui peut se passer d’obliger ses amis en retour de services rendus ou en prévision de services escomptés.

Catherine IL lut le compte-rendu de M. Necker sur l’état des finances de France, etil faut voir avec quel air deconviction elle s’écrie: « L’admirable ouvrage !» Elle prie Grimm de remercier l’auteur et de lui dire « le cas infini » qu'elle fait de ses talents. Elle ajoute : « Je ne doute nullement que le ciel l’a destiné pour tirer la France de l’état très embarrassé dans lequel il a trouvé les finances de ce royaume, mais ce n’est.pas l'ouvrage d’un jour ni d'une année, je le sais par expé-

(1) Lettre à Grimm du 29 mars 1781. ° 16,