Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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faire le vide dans le Trésor public. En 1787 Calonne lui envoie « toute sa kyrielle de projets, » et aussitôt elle écrit à Grimm : « Je crains beaucoup que cela ne soit tout aussi ennuyeux que les trois volumes de M. Necker; je souhaite que cela ne soit pas tout aussi chimérique et aussi inutile. » En 1787 Catherine ne croit plus désormais au mérite de Necker. Les réformes financières qu'il a tenté de faire aboutir au ministère, et qu'il défend dans son ouvrage, ne vont pas à la tête de la Tsarine qui voit gran! etne peut pas se complaire dans une politique de « gains brimboriaux » et d'économies ridicules. L'esprit novateur de Necker a, d’ailleurs, été condamné par Louis XVI. En 1787 cela suffit à Catherine pour le condamner à son tour ; elle est revenue des utopies des philanthropes, elle expérimente sur le vif, et nous savons qu'elle n’est plus disposée à se laisser endoctriner par « les bavards » et les « faiseurs de projets.» Quelques semaines plus tard (le 30 juin 1787) elle dira que Calonne n’a jamais été de son goût, et que ses emprunts doivent le faire détester de la nation. Mais le 21 avril 1788, au moment où Calonne est à son tour obligé d'abandonner le pouvoir, elle porte sur lui etsur Necker,dans un rapprochement téméraire, ce jugement qui ne dénote pas un grand sens des hommes vus à distance. « Je suis persuadée, comme deux et deux font quatre, que Calonne a raison et que Necker a tort, et qu’on a bien fait de renvoyer le dernier et mal fait de faire déguerpir le second. Celui-ci était plus fait pour la besogne que l’autre, quoi qu’on en dise. »