Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

NECKER, MIRABEAU, SÉNAC DE MEILHAN 969

entrevues. La mort du grand orateur vint interrompre ces conciliabules et entraver les plans secrets de l’Impératrice. Les entretiens de Simoline avec Mirabeau sont si vrais que la Gazette de St-Pétersbourg, à la mort de l’orateur, prit une allure et un ton qui contrastaient avec ses habitudes. C’est que l’officieusé gazette connaissait les relations du défunt avec l'ambassade russe à Paris, et les services qu'on attendait de lui. C’est en termes mesurés qu'elle rappelle le rôle révolutionnaire qu'a joué Mirabeau ; et au lieu de piétiner sur son cadavre, elle va presque jusqu'à faire l'éloge du grand citoyen qui, pris tardivement d’un zèle royaliste, a prêté l'appui de son éloquence et de son influence à la cause de l’ordre et d’un roi constitutionnel. Ce jour-là, ce n’est pas un royaliste français qui a rédigé la Gazette. Catherine est passée par là, ou du moins elle a donné l’ordre de ménager celui dont le gouvernement russe a recherché le concours.

Avec Grimm, cependant, elle ne garde pas ces ménagements, et elle serait tentée d'appliquer au grand tribun ce mot de Mirabeau lui-même sur Philippe-Egalité, que Grimm lui rappellera : « Son âme était toujours grosse du crime, sans pouvoir en accoucher.» A quoi bon,en effet.cacher sa pensée vraie à son « souffre-douleurs, » puisque les « pancartes » qu’elle lui adresse ne sont pas destinées à la publicité ?

La Révolution suivra son cours. Catherine ne remarquera pas que si Mirabeau avait vécu et pu à la fois conserver son autorité sur les clubs et venir à bout de